La marginalité peut-elle grandir l’homme, ou l’abaisser, selon qu’elle est choisie ou subie

Thème :   « La marginalité peut-elle grandir   l’homme ou l’abaisser,
                                    
selon qu’elle est choisie ou subie ? »

 Essai de restitution du débat du café philo de Chevilly-Larue
                                             Le 24 janvier 2001.

 Animateurs : Olivier Pascault. Pascal Sautelet                         
Modérateurs : Jean-Daniel Dupasquier. Michel Perrin.

Participants : 80

Après la projection du film “ Les glaneurs et la glaneuse ” d’Agnès Varda s’instaure le débat.

    – film attachant, esthétique, poétique. Ne s’en dégage-t-il pas un essai philosophique ?
     –  Ces prises de vues rappellent celles de Millet qui était allé s’installer à Barbizon. Elles témoignent sur des gens qui se baissent, s’abaissent mais ne se couchent pas. Elles traduisent, essentiellement, au-delà de certaines détresses et la musique aidant, un message de vie, d’humanité.
     – Agnès Varda interroge ses personnages et la caméra les saisit dans la réalité, leur vérité ; il n’y a aucun artifice dans leur action de glanage.
     – Nous, affirme un autre participant, on vit cela tous les jours. La violence n’apparaît pas dans le film. Tout comme a été oublié le glanage à Rungis. Il ne s’agit pas de marginalité mais de pauvreté.
    – Quand on voit tout ce gâchis, comment ne pas penser à tous ceux qui ne mangent pas à leur faim, ici ou là ?
      – Agnès Varda est un témoin. Elle ne cherche pas à montrer toute la réalité, précise le chef-opérateur du film. N’a-t-elle pas réalisé précédemment “ Sans toit ni loi ” ?
     – Glaner, grappiller sont des traditions anciennes. Des lois même autorisent ces “ cueillettes ”. Si de telles lois ont été adoptées, c’est que la pauvreté a toujours existé et elles concrétisaient, en quelque sorte, les premières protections sociales.
     – Dans ce documentaire, on échappe aux héros habituels. Ce sont des gens simples, humbles, dignes. Agnès Varda recherche sa vérité et montre la vérité des modestes. Mais ce film est aussi un autoportrait (ex : gros plan sur ses mains). Le titre du film n’est-il pas d’ailleurs “ Les glaneurs et la glaneuse ” ?

Débat :  – Qu’est-ce que la marginalité ? Les personnages sont-ils des marginaux, hors norme ? Quelles sont les différentes formes de marginalité ?
    – Ce film, intéressant, est bien le regard d’une femme… Il met en évidence les contradictions de notre société de consommation.
     – Les personnages sont-ils des exclus ? S’interroge à nouveau un autre participant. Sont-ils en dehors du système ? N’accomplissent-ils pas des actes naturels ?
    – Si le cinéma anglais traite mieux que le nôtre de ces problèmes, n’est-ce pas parce que le nombre de pauvres en Angleterre est bien plus important ? En France le RMI aide, malgré tout, à survivre. Ne se substitue-t-il pas au glanage ancien ?
     – De ce film beaucoup de choses se dégagent et d’abord une immense tendresse pour tous les personnages.
     – Certains personnages ne sont pas dans le besoin. Sont-ils marginaux ?
     – La marginalité grandit-elle l’Homme ? Et qu’est-ce grandir dans la société, notre société ? Est-ce possible dans et par le travail ? Et sans ? N’y a-t-il pas des connotations négatives (paresse, assistance) vis à vis de ceux qui perçoivent le Revenu Minimum d’Insertion ? Qu’est-ce que la réussite ?
    – Est-il marginal celui qui se nourrit de restes de légumes et de pommes d’un marché, et qui, le soir venu, bénévolement, apprend le français à des immigrés ?
    – Ce film, basé sur le respect de la personne humaine, agite des contradictions (ex : camions : corne d’abondance) pour nous inviter à la réflexion, à modifier nos préjugés.

     – Nous n’avons pas, néanmoins, à nous culpabiliser nous-mêmes. D’autre part, la sécurité alimentaire, le principe de précaution conduisent à se séparer, ne pas consommer certains produits. Mais parallèlement, c’est vrai, le marché de Rungis, jette des tonnes de marchandises pour maintenir un certain équilibre entre l’offre et la demande. De même, des paysans reçoivent des subventions pour détruire des quantités importantes de leurs productions.
    – L’humilité de ces personnages, selon un autre intervenant, est présente en permanence ; ils n’ont point honte de ce qu’ils font et préfèrent glaner que mendier. L’homme a des comportements qui le grandissent.
    – Ce film n’est-il pas comme un bon vers, un bon vin, une nouvelle, un morceau de musique ? Agnès Varda abolit les barrières entre la société et elle, entre le sujet et l’objet. Comme le camion, symbole du système capitaliste, qu’en tirerons-nous ? Comment dorénavant regarderons-nous les autres ? Quel sens allons nous donner à ce que nous entreprendrons ?
    – Ne devons-nous pas, d’abord, rester nous-même ?
    – L’artiste nous a donné à voir. Ne cherche-t-elle pas aussi à éveiller les consciences ? Conclut un des animateurs.

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Une réponse à La marginalité peut-elle grandir l’homme, ou l’abaisser, selon qu’elle est choisie ou subie

  1. Lore dit :

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