Café-littéraire autour de l’oeuvre de Roy Lewis: « Pourquoi j’ai mangé mon père ? »

           Café littéraire,  autour de l’oeuvre de Roy Lewis
                      « Pourquoi j’ai mangé mon père » ?
   
Essai de restitution du débat du café-philo de Chevilly-Larue
                            22 février 2006
                                                                             

Animateur : Alain Brossard.                                              
Modérateur : André Deluchat.

 Après un vote des membres du café philo , l’ oeuvre« Pourquoi j’ai mangé mon père » a été retenu.
Parmi les présents, le livre a pu être diversement apprécié, mais globalement il suscite beaucoup d’intérêt, sujet propre à un large débat. 

 Débat :    – Nous sommes devant une aimable farce, avec un humour très « British »…
    – Nous nous retrouvons au sein d’une horde, l’auteur leur prête sa voix, et voilà que parlant des problèmes de leur époque ils nous parlent tout à la fois de  problèmes actuels…, nous restons avec la question : si hors la technique nous avons réellement évolué, la loi du plus fort ne reste t-elle pas le principe ….?
    – Le père préconise la spécialisation, ce qu’après des siècles nous sommes parvenus à réaliser, mais le profit apporté à la société peut être en décalage avec celui reçu par l’individu…
    – Le père a une volonté forcenée de progrès, sa quête est toujours le dépassement de soi-même.
    – Actuellement ce livre est utilisé en formation à l’IUFM de Nantes, (Institut de formation des maîtres)  dans l’étude des structures pour l’initiation à la lecture…Les cinémas Pathé ont prévu pour le deuxième semestre un long métrage en relief  de cet ouvrage. L’auteur nous raconte la saga d’une famille, d’une horde pithécanthropes, laquelle  nous est  présentée comme le noyau de l’espèce qui va être dominante. Est-ce du à l’origine anglaise de l’auteur que nous sommes dans le Darwinisme à la lettre ? En fait le titre en anglais fut aussi  ‘’L’homme qui fît l’évolution ‘’ Edouard, le père se présente comme le chaînon entre l’homme qui vient tout juste de quitter les arbres et l’Homo Sapiens. Ce personnage nous interpelle, car nous savons qu’il est déjà, il y a 450.000 ans avant J.C., ce que nous sommes en gestation : un de nos plus anciens ancêtres qui s’adresserait à nous par delà les siècles qui nous séparent. Il nous fait comprendre que notre devoir d’homme c’est d’avancer vers plus d’humanisme, de toujours progresser. « Les possibilités sont prodigieuses », s’exclame t-il !
    – Le personnage du père est comme un double de l’auteur, qui serait un paléontologue revenu vivre dans une époque avec ses connaissances et son souci de l’évolution de l’homme, comme si le personnage pressentait le degré de modernité auquel l’homme peut accéder. Nous trouvons là toutes les questions, éthiques, sociales, économiques, qui sont pour beaucoup encore des questions d’actualité…
    – Le chef de la horde institue la transmission du savoir comme base de développement…La notion de compétition, le Darwinisme sont omniprésents : « …sur le plan culturel c’est à peine si nous sommes plus développés que l’australopithèque…et lui, croyez-moi il va droit à la poubelle… » (Page 92)
    – Nous sommes dans le contexte historique des années 6O. Lorsque ce livre est écrit, c’est alors la guerre froide, le monde entre deux modèles : « je suis un libéral Edouard mais j’ai le cœur à gauche.. », (Page 16).  C’est aussi l’époque de la bombe A (une grande peur) qui est imagée par l’incendie, la perte de la maîtrise de cet élément, le feu…, mais l’optimisme du progrès demeure, puisque l’homme apprend finalement à dominer le feu…
    – Nous sommes déjà face à la volonté d’aller très vite vers le progrès et, celle de tempérer, voire de le freiner : « Si on reste dans les limites…on ne transgresse pas les lois de la nature » (Oncle Vania).
    – « La nature est avec l’espèce qui  possèdent sur les autres une avancée technologique. Pour le moment c’est nous… » (Page 32). Encore l’ambiguïté Darwinienne…
    –  « Chaque espèce s’échinait pour se montrer plus prolifique, plus ingénieuse que toutes les autres, et justifier ainsi sa prétention à être la plus apte à survivre. Ce modèle échevelé de libre entreprise prouvait bien que l’intérêt personnel éclairé produit la plus grande richesse et nourrit le plus grand nombre… » On retrouve  le credo du libéralisme économique.
    – Toute la première partie nous montre comment l’homme se défait peu à peu de son animalité, comment d’un être physiquement inférieur, il va dominer sur toutes les espèces.. 
    – Le père n’est-il pas la voix de la raison, une voix qui, (restons dans la fiction) nous parlerait encore ?
    – Nous voyons avec tous les exercices auquel le père soumet les enfants comment il n’est d’évolution que par l’acquis et que l’Inné n’est que notre part animale…
    – « À mesure que nos chasses gagnaient en efficacité, les femmes pouvaient passer plus de temps aux travaux de ménage, au lieu d’être obligées de suivre les chasseurs pour avoir leur part de butin. Ce fut à cette époque que père commença à dire que la place de la femme est au foyer. Mais nous autres garçons nous nous joignions aux chasses… » (Page 49). Le machisme commence à s’installer, nous en revenons toujours aux premières structurations de nos groupes, société,  famille,  de par cette nécessité, la chasse
    – La séparation de l’animalité se fait par diverses voies, « A dix lieues vers le sud il y a une horde.. Vous y trouverez les compagnes qu’il vous faut…- Mais P’pa c’est contre nature ! Peut-être, mais c’est fini dit le père avec gravité. Ici commence l’exogamie….Il faut maintenant mélanger un tantinet les gènes…Quand vous serez accouplés, vous pourrez ramener vos filles au bercail. Au lieu d’une horde, nous serons une tribu, premier progrès… », (Page 90), la horde, la tribu, la cité, le peuple…
    – Et enfin, pourquoi ont-ils tué le père ? « Et il saisit le premier arc que l’on ait jamais vu. Père envoya une flèche à près de 50 mètres…- Les possibilités sont prodigieuses. Je regardais le vieux avec tristesse. Qu’est-ce que nous allons faire…( demande le) frère, Oswald…- J’y ai déjà songé.., il faut qu’au prochain tir d’essai il se produise un accident » (Page 179). Le père est-il la première victime de l’utilitarisme économique ? Ou doit-on préférer la déclaration du père (Page 158), « Je suis un homme de science, dit père d’une voix calme. Je considère que les résultats de la recherche individuelle sont la propriété de la subhumanité dans son ensemble…, le travail de chacun profite à tous, et c’est pour toute l’espèce que s’amassent nos connaissances ».  

Nombres d’interventions ne peuvent être rendues, les notes sont prises, « à la volée ». Après plus de deux heures de débat, de discussion animée, chaque participant avait encore beaucoup à dire.
Nous avons convenu de renouveler cette expérience de  café littéraire, pour le moins, une fois l’an.

 

 

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