Le peuple des mots

Le peuple des mots m’enchante.
Le charivari de leurs revendications se coule dans un brouillard qui les éloigne de ma conscience.
En foule, en cohorte, enchaînés, c’est le peuple esclave des pensées interlopes.
En trame, ils tissent le dessin chatoyant d’une langue fossile.
Ils sont fatigués et leurs sens sont émoussés à force d’être limés et encastrés de force dans les
copiés collés d’une harangue facile et jubilatoire.
Ils glissent sur la surface du discours comme les cygnes évidents de notre prépondérance.
Et dans le gouffre béant des mots creux tombe l’innocence absolue qui voulait comprendre.
Mais il n’y a rien à comprendre.
Ils sont les grelots sur le chapeau du fou du roi. Leur verbe clinquant amuse la galerie.
Ils clignotent comme les signaux de l’appartenance sémantique.
Les mots ne font pas de politique, ils l’incarnent. Ils sont la chair désincarnée de notre suave
indifférence. Enchaînés à la phrase, ils sont les galériens de la conquête.
En foule ils se fondent, associés ils s’évaporent. Le roi mot a abdiqué, sa majesté idée
s’avance. Elle a pris le pouvoir et le mot s’efface.
Ecrit et lu par Florence Desvergnes
lors du 13ème printemps des poètes le 13 mars 2013 à l’Haÿ-les-Roses
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