Les formes du dialogue

August Make. Détail de la promenade. 1813.

August Make. Détail de la promenade. 1813.

Restitution du débat du  22 novembre 2017 à Chevilly-Larue

Animateurs : Guy Pannetier. Danielle Pommier Vautrin.

Introduction : Danielle Pommier Vautrin

Introduction :  Le dialogue, du grec « dia » entre, et « logos », parole. Un dialogue permet la communication par l’échange de paroles entre deux personnes ou deux parties. Il demande d’écouter l’autre, et de préciser son argumentation. Il permet le surenchérissement de l’un sur l’autre pour élaborer une théorie ou avancer dans une réflexion ou un débat commun.
Le dialogue est différent de deux monologues de sourds où chacun campe sur sa position et où on ne parle que pour soi, pour s’écouter parler, mais pas pour entendre quelque chose de l’autre ou le comprendre.
Le dialogue permet d’éviter des polémiques stériles et des conflits à cause de préjugés. Dans un dialogue il y a échange et élaboration des positions contrairement à deux monologues où chacun s’en tient à son opinion (cas de la justice, la politique etc.)
Que suppose le dialogue ? Une bonne qualité d’écoute et de bienveillance pour ce qu’exprime l’autre que l’on soit d’accord ou pas.
Une confiance dans l’honnêteté intellectuelle de son interlocuteur.
Une langue commune que ce soit une langue nationale ou ethnique ou un jargon, ou une langue symbolique, dans une discipline (scientifique, économique, littéraire, médicale, religieux, maçonnique, politique, etc.)
Quelles formes le dialogue peut-il prendre ? Le dialogue peut prendre différentes formes qui peuvent aboutir à la compréhension par l’autre :
– La douceur, la tendresse,
– Le respect de l’autre
– le souci des relations sociales
– les arts : musique, peinture, objets, sculptures, le théâtre, et tout ce qui sert à dire quelque chose à l’autre (son public). Ne parle-t-on pas aussi de dialogues dans les pièces de théâtre, les films etc. ?
– Dans la littérature où l’on peut se trouver en communion avec le livre que l’on lit et dans un dialogue intérieur en confrontant ses positions à celles de l’auteur.
– Dans la méditation où certains ont rencontré  et parlé avec leur maître intérieur.
– Avec les enfants en essayant de leur donner une éducation solide et une confiance en eux sans les contraindre. En évitant le rapport de forces et en privilégiant la communication et le respect de l’autre par chacun.
– Le dialogue vu par le Président Macron qui dit privilégier à sa manière le dialogue au rapport de forces : « j’aime beaucoup aller au contact des gens pour parler avec eux… et essayer de les convaincre ! » (sic)
– Dans certains handicaps le dialogue peut avoir lieu dans une langue spéciale : langue des signes des malentendants ou braille des malvoyants.
– Dialogue particulier avec la presse et les médias qui nous font réagir face à leurs assertions.
– Cas des dialogues par la violence où la puissance de conviction peut se faire par des coups – mais heureusement cela ne marche pas souvent. Mais je connais un cas d’enfant battu qui est un homme formidable grâce à son amour pour les siens et les autres. Identification inverse.
– Le dialogue est à l’œuvre dans la démonstration dialectique où l’on donne à l’autre une argumentation en échange de la sienne.
– Le E-dialogue permet également de communiquer par tous les moyens informatiques : mails, SMS etc. avec peut-être ses limites.
– Dans le dialogue on a un antidote à l’autorité arbitraire : dans le couple, dans les familles,
avec les amis, dans les associations, dans la société en général…
– Le dialogue est aussi un obstacle à la manipulation séductrice mais perverse, ou quand « l’autre » utilise vos arguments pour les travestir. Il permet de demander des explications rationnelles, si possible.Les périodes de l’histoire et le dialogue

                Causes négatives     et      Effets positifs
Négatif: Dictatures dans tous les pays d’Europe
Positif: Les droits de l’homme et la DUDH
lors de la seconde guerre mondiale
Négatif: Inquisition
Positif: Mai 68 et tous les échanges facilités
Négatif: Les fanatismes religieux de toutes les époques
Positif: Les églises  qui réfléchissent (Vatican II)
Négatif: Les totalitarismes
Positif: Les lois humanistes
Négatif: Les égoïsmes
Positif: L’altruisme
Négatif: L’ignorance
Positif: La culture et/ou la vie intellectuelle
Négatif: L’exclusion, le racisme, la haine
Positif: Les associations de défense de causes humanitaires
Négatif: Le repli identitaire
Positif: L’ouverture et la tolérance
Négatif: Les intérêts individuels
Positif: Les engagements collectifs
Négatif: Les guerres
Positif:  Les mouvements pacifistes
Voici quelques pistes qui peuvent nous permettre d’avancer sur la voie du dialogue…

 

Débat

 

 Débat :  ⇒  Il a été cité, mai 68 grand moment de dialogue citoyen, et plus près de nous nous avons eu « Nuit debout », avec ces grandes messes de l’expression. Cependant parfois, le dialogue n’a pas toujours été très ouvert ; des hommes politiques se sont fait « jetés », des intellectuels qui n’auraient pas eu « la bonne couleur » chassés, ostracisés, comme la philosophe Alain Finkielkraut. Un homme que je connais s’est vu refusé la parole dans un débat sur le féminisme au seul motif qu’il était un homme, et qu’il n’était pas concerné. En dehors des ces quelques dérapages, c’était sympa de voir toute cette jeunesse assemblée, dialoguant. En revanche difficile de dire précisément sur quoi cela a débouché.

⇒  Ce genre de dialogue ne peut pas déboucher sur rien. Pour plein de nombreux jeunes c’était « se dépuceler l’esprit ». Mais dès qu’au cours du dialogue on abordait des projets de construction, cela bloquait. C’était un dialogue qui n’allait pas jusqu’au bout.

⇒  Le dialogue, l’échange, n’oblige pas à ce qu’on arrive sur un accord. Le dialogue permet de développer des idées, voire faire avancer un débat, faire réfléchir.

⇒ Oui, le dialogue n’exige pas au final d’obtenir le consensus, on ne repart pas « la main dans la main », mais les idées échangées peuvent faire bouger, ne serait-ce qu’un peu nos certitudes, bousculer des a priori. C’est un peu ce que l’on fait au café-philo.
Si l’on part de l’étymologie du mot « dialogue » « DIA » entre, et, « logos » parole ; on voit un principe, celui de transmettre une idée par la parole, un échange entre une ou plusieurs personnes ; un émetteur, un ou plusieurs récepteurs, auditeurs, sauf à parler tout seul.
Même si je préfère chercher des sources autres que Wikipédia, j’ai voulu voir leur définition du mot dialogue, et là je suis surpris et même en désaccord, car pour eux (je cite) : «  Le dialogue se distingue de la discussion et du débat. Il se réfère à un mode de conversation qui concerne nécessairement, raison, discernement, exactitude, et sagesse ».  Donc, ce soir, nous ne faisons que débattre, et nous n’avons « ni la raison, ni le discernement, ni la sagesse…», et nous ne dialoguons pas. Je ne suis pas d’accord avec cette restriction.

⇒  Dans son dictionnaire philosophique, André Comte-Sponville, donne cette définition du dialogue : « C’est le fait de parler à deux ou à plusieurs pour chercher une vérité, c’est un genre de conversation tendu vers l’universel plutôt que vers le singulier ; comme dans une conférence, tout comme vers les particuliers dans la discussion. On y voit ordinairement plus ou moins depuis Socrate une des origines de la philosophie ; tout dialogue tend vers l’universel, c’est-à-dire l’esprit et notre capacité à s’y installer. De là, l’échange des arguments, et parfois la tentation du silence ».
Cette définition nous éclaire bien pour notre débat.

⇒  En philo le dialogue a sa référence dans les œuvres de Platon, comme dans le « Théétète » des discussions organisées, des échanges entre ses divers personnages, ils argumentent, ils confrontent des idées pour faire émerger « les idées de Platon ». Ce dernier se fait même ventriloque pour faire parler Socrate qui n’a laissé aucun écrit.
Dans la littérature, il me semble que le dialogue commence véritablement avec Cervantès, avec le dialogue entre Don Quichotte et Sancho, puis on retrouve des œuvres dialoguées au 18ème siècle, comme chez Voltaire, avec « Candide », ou chez Rousseau avec « La nouvelle Héloïse ».
Je raffole des dialogues des fables de La Fontaines, où il fait parler les animaux à la place des humains, pour parler de nous.

⇒  Dans la philosophie grecque on a fait parler de la philosophie par le dialogue, ce qui va disparaître au moyen–Âge avec les grands récits, les grands écrits théoriques.

⇒  Au Moyen-Âge, il y a un théâtre populaire, il y a du dialogue.
Au Moyen-Âge on jouait « Les mystères »  sur les parvis des églises. C’était des thèmes religieux avec des personnages, des démons, avec « la mère Carême »  et son poisson.., des dialogues très drôles. C’était des spectacles impies joués lors du Mardi-Gras.

⇒  Lorsqu’on assiste à une discussion, en dehors des mots, les gestes, les expressions du visage participent au dialogue. Le visage dit j’approuve, je désapprouve, et le geste accompagne le propos…

⇒  Les Italiens connaissaient déjà cela avec des dialogues en pantomime.

⇒  Pour que le dialogue fonctionne, il faut un langage et des codes communs. Mais accompagner son propos de gestes sera reçu différemment, si par exemple vous vous adressez à un japonais, il y a risque d’équivoque.

⇒  Il y a un dialogue qui n’est plus, c’est le dialogue épistolaire. On a évoqué notre époque Internet, de la communication plus que du dialogue. On a, pour certains, connu une génération où le dialogue avait plus de profondeur ; par exemple quand on écrivait une lettre (ce que l’on ne fait plus), on réfléchissait un moment avant d’écrire une phrase, le stylo restait un instant en l’air; on essayait d’imaginer comment le correspondant allait interpréter la phrase, car les écrits restent (les mots s’envolent). Aujourd’hui les pouces vont trop vite, la réflexion ne précède plus toujours, l’expression. On est plus vite dans la réaction, mais peut-être, que le fait de plus de spontanéité rend le propos plus naturel ???

⇒  C’est le dialogue « Petite Poucette », de Michel Serres

⇒  Si le naturel c’est, exprimer des pulsions sans filtre, je ne suis pas d’accord. Etre impulsif, n’est pas être naturel.

⇒  Le dialogue est d’autant plus simplifié qu’intervient parfois le correcteur dans Internet qui choisit ses mots à votre place, ceci à partir de son « langage intuitif »

⇒  Le dialogue épistolaire a déclenché une forme de littérature au 18ème siècle. Il y en a eu tout plein, dont l’ouvrage « La nouvelle Héloïse » déjà cité. Cela venait du fait que depuis x temps, les hommes de lettres, les scientifiques, les chercheurs avaient établi de véritables dialogues épistolaires ; « je t’envoie une lettre – tu me réponds.. » Ils communiquaient à travers le monde sur leurs domaines de connaissances.

⇒ Pascal, le janséniste, fera de même, des dialogues par publications de réfutations, avec les Jésuites, et cela s’appellera « Les Pensées ».

⇒ Lorsqu’on est devant sa feuille de papier, que l’on écrit à quelqu’un, alors on est deux. On pense à l’autre ; comment va-t-il recevoir mon propos ? C’est un dialogue distancié. C’est parfois l’occasion de dire des choses qu’on n’aurait pas dites autrement. Kafka n’aurait pas écrit « La lettre au père » par SMS.

⇒  Est-ce que les SMS, les Tweet, nous laisseront des éléments d’archives, de dialogue de notre époque.

⇒ Nous avons récemment beaucoup entendu parler de ce dialogue épistolaire que constituaient les lettres à leur famille des soldats de 14/18. C’était une première fois dans ce domaine, et cela était dû particulièrement au fait que ces jeunes soldats était la première génération de l’école publique, de l’époque Jules Ferry qui avait appris à écrire.

⇒  Le dialogue est-il utilisé uniquement dans le but de convaincre ?

⇒  Si on ne dialogue pas, on ne s’expliquera jamais, le dialogue est justement l’antidote du conflit, des préjugés, des rancunes…

⇒  Est-ce que la prière est un dialogue ?

⇒  Si on arrive à parler à Dieu, oui !

⇒ Et s’il ne répond pas ?

⇒ Pour de nombreuses personnes, c’est un dialogue.

⇒  La prière est un dialogue intérieur ; il échappe à la définition rigoureuse du dialogue. La dialogue intérieur c’est aussi un dialogue avec soi-même, en se donnant parfois les arguments pour, et les arguments contre.

⇒  Le journal intime est-ce une forme de dialogue ?

⇒  Le journal peut difficilement être considéré comme dialogue dans la mesure où la partie « logos » (la parole exprimée) n’y existe pas; il faut, pour pouvoir parler de dialogue, l’expression orale, l’adresse à l’autre, et que celui-ci soit un véritable interlocuteur.

⇒  Dans les différentes formes de dialogue, on trouve le dialogue polémique, dialogue ou débat contradictoire, où il faut convaincre, avec parfois la dialectique de la mauvaise foi, ne pas trop s’attacher à la vérité, où les arguments les plus spécieux sont utilisés ; argumenter, réfuter, comme le préconise Schopenhauer dans « L’art d’avoir toujours raison ». Il y a un film actuellement sur les écrans où un prof d’université forme une jeune étudiante à la rhétorique pour participer au concours annuel d’éloquence de la magistrature (Le brio d’Yvan Attal).
Un autre film évoque à merveille ce sujet, c’est «  A voix haute ; la force de la parole »

⇒ La symétrie me parait importante dans le dialogue. Il faut que les interlocuteurs soient à équivalence  de connaissance.

⇒  Dans le film le Brio, j’ai retenu cette belle réplique du dialogue. Un personnage dit : « Il sait si bien parler qu’il ne sait pas dire les mots simples ».

⇒  A partir du moment où on est dans l’éloquence, dans la rhétorique, c’est pour séduire, ce n’est pas pour être à forces égales. Dès qu’on met l’éloquence dans le dialogue, la parole est fausse, c’est la forme qui l’emporte sur le fond. Si Danton polémique avec Robespierre, ils sont à armes égales, même si contre n’importe lequel d’entre-nous, il nous réduit à néant.

⇒  Une phrase de Prévert dans « Spectacle » illustre parfaitement la perversité d’un certain  dialogue polémique : « Qu’est-ce que cela peut faire que je lutte pour la mauvaise cause, si je suis de bonne foi. Et, qu’est-ce que ça peut faire que je sois de mauvaise foi, si je lutte pour la bonne cause ».

⇒  Dans les villages africains, les hommes se réunissent sous l’arbre à palabres, des réunions où l’on débat.

⇒  C’est nous, les Occidentaux qui avons idéalisé ces palabres qui sont de fait un lieu où l’on expose des problèmes, des dissensions, qui seront jugées par les anciens, ou par le chef du village.

⇒  C’est un peu « le dialogue social »  (à la mode aujourd’hui) : on convoque, on vous écoute, et le « chef de village » décide.

⇒  Cela n’arrive pas tous les jours des bons dialogues, d’être en face d’un interlocuteur avec qui l’on peut parler, exprimer ses idées, apporter ses réflexions  sans se sentir jugé, sans être systématiquement contredit…

⇒  Il y a une forme de dialogue de groupe qui a totalement disparu depuis plus d’un demi- siècle avec l’arrivée de la télévision : ce sont les veillées. Les gens se réunissaient, discutaient longuement, échangeaient, ils n’étaient pas pris par le temps. Etant enfant j’ai assisté, et participé à de nombreuses veillées aux noix. On y racontait des histoires, les plus jeunes chantaient avec leurs petites partitions ,couleur sépia , achetées sur des marchés.

 ⇒ On a de moins en moins de dialogue « en face », avec l’adresse à l’autre. On communique plus et on se parle moins, on va vers une nouvelle forme de dialogue, qui s’ajoute.

⇒  Je préfère entendre mes enfants au téléphone, que d’avoir un SMS.

⇒  Dans l’esprit des fêtes qui approche et le bonheur de la verve de Voltaire, j’ai relevé son fameux « dialogue de la poularde et du chapon » :
– La poularde : Une maudite servante m’a prise sur ses genoux, m’a plongé une longue aiguille dans le cul, a saisi ma matrice.., l’a arrachée et l’a donnée à manger au chat. Me voilà incapable de recevoir les faveurs du chantre du jour, et de pondre.
– Le chapon ; Hélas ! Ma bonne, j’ai perdu plus que vous ; ils vous on fait poularde et  moi chapon.
La seule idée qui adoucit mon état déplorable, c’est que j’entendis ces jours-ci  près de mon poulailler, raisonner deux abbés italiens à qui on avait fait le même outrage afin qu’ils puissent chanter devant le pape avec une voix plus claire.
– La poularde : Quoi ! C’est donc pour que nous ayons une voix plus claire qu’on nous a privé de la plus belle partie de nous-même ?
– Le chapon : Hélas ! Ma pauvre poularde, c’est pour nous engraisser, et rendre notre chair plus délicate.., car ils prétendent nous manger.
– La poularde : Ah ! Les monstres !
– Le chapon. : C’est leur coutume, ils nous mettent en prison pendant quelques jours ; nous crèvent les yeux pour que nous n’ayons point de distraction ; enfin, le jour de la fête étant venu, ils nous arrachent les plumes, nous coupent la gorge, et nous font rôtir.
On nous apporte devant eux dans des grandes pièces en argent ; chacun dit de nous ce qu’il pense ; on fait notre oraison funèbre ; l’un dit que nous sentons la noisette ; l’autre vante notre chair ; on loue nos cuisses, nos bras, notre croupion ; et voilà notre histoire dans ce bas monde finie pour jamais.

Et parler du dialogue c’est aussi se souvenir des dialogues truculents de  Michel Audiart. J’en ai noté, choisi deux : « Quand on mettra les cons sur orbite, t’as pas fini de tourner » Et   « Quand les types  de 130 kg parlent de certaines choses, ceux de 60 kg les écoute »

⇒  Je me suis posé la question quant à l’art chez l’écrivain de faire dialoguer des personnages avec leur identité propre ; est-ce qu’on  a le fil de toute une histoire et les personnages avec le propos arrivent. C’est pour moi, le génie de l’écriture ; et dans un roman avec plusieurs personnages, les tirets qui mettent tour à tour, les personnages en scène, me les rendent presque présents ; je vois le personnage, le personnage qui va parler….

⇒  Le dialogue littéraire ce n’est pas un fil qu’on déroule. C’est construit, c’est pensé très avant, il y a de l’inspiration et de la transpiration.

⇒  Dans le dialogue littéraire on est avec le personnage, cela crée une proximité. Il y a quelque chose comme un échange. Comme dans un courrier, c’est  un transfert d’humanité.

⇒  Quand on est en dictature ou totalitarisme, c’est toujours le même discours en peu de mots, les mêmes paroles, il  n’y a pas de place pour la réflexion, et pas de dialogue réel.

⇒  On a dit qu’il faut avoir les mots clefs, les mêmes codes, soit ! Mais quand l’autre n’a pas ces mêmes codes et qu’on réussit néanmoins à ouvrir le dialogue, là, c’est aussi une réussite.

⇒  Si je discute avec quelqu’un du 16 ème (par exemple) je n’ai pas les mêmes clefs quand à l’aspect social, et avec les clefs intellectuelles, on va peut-être se combattre. On peut se comprendre en n’ayant pas les mêmes idées.

⇒  Un des meilleurs exemples du dialogue politique est la pièce de théâtre (et film) « Le souper » avec Claude Rich en Talleyrand, et Claude Brasseur en Fouché.

⇒  On est dans la joute verbale, avec toutes les subtilités du langage. Dans ce genre on peut citer également ; « Ridicule » avec les dialogues des salons du 18ème siècle, où on peut humilier avec un mot, une saillie, un mot d’esprit.

⇒  Le dialogue, dans des moyens de communication, comme la presse, obéit aujourd’hui à la règle des trois « C ». C’est-à-dire : court – clair – concis. On a tendance à concentrer le propos au point de parfois lui faire perdre du sens. Et si l’on fait trop long, c’est coupé ; pour faire bien, il faut faire : court, clair, et concis. Cela limite le dialogue et l’élaboration de la pensée.

⇒  Lorsqu’on s’adresse à un public, on ne parle pas comme si l’on parlait avec sa belle-sœur ou son collègue de bureau. Il faut structurer sa pensée pour être sûr que l’on sera compris de tous : « Il faut penser sa parole, avant que parler sa pensée ». Et il y a une notion de respect de ceux à qui l’on s’adresse, parce qu’ils ne doivent pas être captifs d’un temps de parole qui nous est accordé, pas captifs de ceux qui délayent, qui s’écoutent parler, ou  ce « parleur étrange, et qui trouve toujours l’art de rien dire avec de grands discours » (Molière. Le misanthrope). Il faut savoir garder l’attention de l’autre qui vous « prête l’oreille ».

⇒  Moi je ne viens pas au café-philo pour dialoguer, je viens pour écouter.

⇒  Je ne suis pas d’accord sur ce point. Celui qui écoute est la part indispensable du dialogue, sinon on parle tout seul ; le silence n’est pas refus de dialogue. Dans le dialogue il a un émetteur et un ou des récepteurs qui peuvent à leur tour devenir émetteur.

⇒  Je reviens sur cette intervention qui nous dit qu’il faut de plus en plus faire court dans l’écrit. Je crois que c’est un mal de notre époque, dans ce temps qui semble se rétrécir, la vie va plus vite. Le temps d’écoute et d’attention diminue, il faut aller à l’essentiel, sinon, on zappe.

⇒  J’ai attrapé la maladie du « faire court » ; j’ai trop peur d’ennuyer.  Il y a des longues tirades où l’essentiel tient en trois coups de stabylo.

⇒  Certains n’ont pas l’art de la synthèse, et il leur faut plus de temps, en passant même par des détours. Si on ne leur laisse pas le temps, ils ne parlent pas. Ils parlent à leur rythme, il faut leur laisser du temps pour que la pensée descende dans les mots.

⇒  Ah si je savais parler comme je sais penser !

Références :

Définition du mot dialogue. Wikipédia.
Dictionnaire philosophique. André Comte-Sponville PUF. 2001.
Le Théétète. Platon. – 394.
La nouvelle Héloïse. Rousseau. 1761
La poularde et le chapon. Voltaire. 1763
L’art d’avoir toujours raison. Schopenhauer. 1831

Films :

A voix haute : la force de la parole. De Stéphane de Freitas et Ladj Ly. 2017
Le Brio d’Yvan Attal. 2017
Ridicule. De Patrice Leconte. 1996
Le souper. D’Edouard Molinaro. 1992.

 

 

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