Thème « Séduire est-ce mentir ? »
Essai de restitution du café philo de Chevilly-Larue
14 juin 2002.
Modérateur : Murielle Desmet
Introduction au débat : Guy Philippon
Animateur : Guy Philippon
Séduire est-ce mentir ? Oui. Séduire, c’est détourner du droit chemin, c’est user d’artifices pour susciter le désir des autres et exercer un pouvoir sur eux. Le séducteur n’est pas honnête, il ment, il joue un rôle pour dominer ses victimes.
Séduire est-ce mentir ? Non. La séduction est l’effet naturel qu’exerce un bel objet sur notre sensibilité. C’est parce que l’on est séduit que l’on désire. La séduction n’est pas une aliénation, elle est « ce qui se passe » quand quelque chose nous plaît.
Introduction : On peut se servir de la séduction pour mentir, pour détourner quelqu’un de ses voies. Chacun a à l’esprit la référence du grand séducteur de la Bible, qui séduit Adam et Ève par de belles paroles. Ce qui fait problème dans le sujet c’est l’équivalence posée entre séduire et mentir. Remarquons déjà que le mensonge est délibéré alors que l’on peut séduire naturellement et sans intention de séduire, et ni d’en user pour mentir. La séduction ne peut réussir que si l’objet y consent alors qu’il est rare que la victime d’un mensonge souhaite être abusée.
Débat : – Jamais j’ai séduit qui que ce soit. La mère de mes enfants, je ne l’ai jamais séduite mais j’ai appris à l’aimer.
– Séduire et mentir ce n’est pas la même chose. La séduction c’est montrer vraiment ce que l’on est. Montrer le bon côté. La séduction n’est pas réservée aux femmes.
– Don Juan séduit sans fin, il est dans la rage de séduire alors qu’il est chaste. C’est un calculateur, Il joue un rôle afin de séduire ses proies ».La séduction naturelle, qui existe, lorsqu’elle est spontanée, attirance réciproque, de deux personnes, liée au désir.
-La séduction c’est qu’on a envie d’amener quelqu’un à soi. Séduction et mensonge sont incompatibles, sauf dans les affaires. La séduction dans l’amour, c’est acquérir l’objet de son désir.
– La séduction comme le mensonge sont des moyens ». On peut séduire dans le but de posséder ou dans le but de découvrir. C’est se livrer. Une manière de se créer un miroir. Les deux peuvent coexister mais ce sont des moyens.
– La séduction peut être un mensonge lorsqu’il y a stratégie de séduction. C’est l’intention qui compte quel que soit le moyen.
– La séduction naturelle est celle qui dure le plus longtemps. La séduction est mensongère lorsque, le séducteur se montre différent de ce qu’il est réellement dans le but de contrôler, voire de posséder, d’exercer un pouvoir. La séduction est un mensonge caché. On arrête d’aimer quand on a trop possédé.
– Dans le cas d’une séduction consciente, çà peut être un projet. Ceux qui séduisent les élèves quand çà marche bien. Une théâtralisation d’éveiller les curiosités. Il y a presque obligatoirement un acteur. La séduction est un projet sur autrui. Pourquoi et de quelle manière ? Pour l’enseignement c’est indispensable. »
– Sujet d’une émission de radio : Deux personnes se séduisent sur Internet. Dans la réalité, ils se sont aperçus que ce n’était que virtuel. On est séduit par un paysage, une belle musique, un tableau. Parfois le charme est séducteur de lui-même.
– La séduction peut être un autre mode de langage ». Pour celui qui reçoit, il interprète un langage de séduction, l’autre peut répondre aux attentes, (émetteur et récepteur). Même les mots les plus neutres peuvent êtres enrichis. La tonalité de la voix, le regard, les mots, tout ceci fait rentrer en résonance. La séduction est au verbe ce que l’arôme est à la cuisine. La séduction permet de manifester au dehors ce qui constitue l’invisible du dedans.
– On cherche en fait à susciter l’intérêt de l’autre, à complaire à l’autre.
– Être dans la séduction d’intérêt peut devenir une forme d’aliénation, un schéma de soumission. »
– « Le monde appartient à celui qui l’embellit ». Est-ce que celle ou celui qui l’embellit pose des problèmes ou des ennuis à l’autre ? Quelles sont ces questions qui font un procès d’intention avant qu’il ait lieu ? Le monde s’habitue à la misère mais se rebelle contre ce qui est beau. Il faut montrer aux élèves ce qui est bien et va bien sinon on s’habitue à ses habitudes.
– Il peut y avoir culpabilité par rapport à son désir, donc refouler celui-ci, ne pas être en contact avec son moi profond, refuser d’aimer par peur de perdre le contrôle et entrer dans des jeux de séduction.
– N’est ce pas à plusieurs niveaux : sauvegarde de l’espèce, une forme de communication implicite. La séduction est l’appel du désir. Le désir dans l’absolu est au-delà un dépassement de soi-même, un soi profond, une vérité profonde.
– Dans atome crochu il n’y a pas besoin de séduction, pense une autre. « Les hommes politiques s’apparentent à la séduction ». Il peut y avoir aussi mensonge
– Ne séduisons-nous pas dans tous nos actes de la vie ? » Pour nous, les animaux, la nature, l’amitié, le travail (séduction/promotion).
– « L’Homme réduit à ses propres forces n’est pas un séducteur ». La séduction c’est un pouvoir d’exercer. Il faut un décor. La publicité n’est ce pas autre chose que de changer le décor de quelque chose de non sérieux. La séduction s’achète.
– Si contenant et contenu ne sont pas en harmonie, c’est du mensonge.
– Qu’est ce qui est désirable ? Un Homme « brut ou brute » ?
– La séduction peut se faire dans le naturel et non dans les produits de luxe.
-Une femme qui veut séduire se montre sous son meilleur jour, d’ailleurs dans la publicité, il y a une mise en valeur de l’image.
– La séduction c’est le regard, l’intelligence, la culture, mais c’est aussi d’abord l’esthétique ».
-On est dans un plaisir des autres. On est dans une dynamique culture de soi, dans laquelle on veut séduire tout le monde. « Pour être beau faut-il effacer d’autres gens ? » Les critères sont différents suivants les pays.
-Peu de gens, en fin de compte, cèdent au désir comme attirance spontanée, libre et involontaire pour une autre personne, parce que succomber oblige que l’on renonce à contrôler, à posséder, pour établir un partage et une invention quotidienne de la relation dans l’amour et le plaisir. »
– On ne sait jamais qui on aime et par qui on est aimé. Part d’inconnu pour celle qui séduit et celui qui séduit. Avoir prétention de connaître l’autre est aléatoire. La raison est une relation entre deux êtres. Socrate, pas beau, séduisait. S’il n’y a pas de séduction la vie s’arrête ».
– C’est un moteur, dans l’ennui, dans le gris du quotidien pour atteindre ses idéaux. Cela rejoint Platon dans « le beau et le vrai ».
– Est évoque le film « Le Cercle des Poètes disparus » comme moteur. Quand on a besoin de séduire ou d’être séduit il y a une vérité que l’on ne veut pas connaître. On ne peut pas être condamné car il y a une évolution. Si on a séduit par mensonge on est condamné. On est dans une société dans laquelle ce qui est interdit n’est pas respecté.
Conclusion : Toute séduction n’est pas dangereuse. Derrière la peur de la séduction c’est la peur de sa propre liberté et celle des autres. La séduction pour peu qu’elle soit libre de toute visée de pouvoir ouvre sur un espace de jeu qui arrache pour un temps ses rapports à la mécanique de la production et de la reproduction. Dans le jeu de la séduction ce qui se joue c’est ce qui est impalpable, insaisissable par le pouvoir lorsque celui-ci se mêle de la condamner au nom de la morale, c’est en général pour le récupérer à son profit. Dans un monde gris on n’accepte pas que deux êtres soient séduits. « C’est pour cette raison qu’on lie toujours la séduction au mensonge ».