Thème : «La politique est-elle une science ou un art ? »
Essai de restitution du café philo de Chevilly-Larue
23 octobre 2002
Introduction au débat et animateur : André Deluchat
Modérateur : Annie Dyreck
Introduction : Tout d’abord, le terme « politique » renvoie, par son étymologie, à la Grèce ancienne, où « polis » désigne la cité organisée, tandis que le terme « politéia » signifie à la fois « constitution » et « ensemble des citoyens ». En raccourci, il est souvent faire référence à la racine grecque du terme « politique » pour parler de la chose publique, ou de l’intérêt public. D’Aristote (philosophe grec, disciple de Platon) à Max Weber (sociologue allemand), de l’anthropologie politique à l’analyse des facteurs économiques, la science politique a cherché à construire une théorie générale des liens entre la société globale et la politique. Parler politique pour chacun d’entre nous, c’est s’interroger, c’est interpeller notre conscience. C’est un déplacement, une trajectoire, un mouvement du qui suis-je vers qui sommes-nous ? Pour conduire ce déplacement cela implique un savoir, une technique, un art. On parle de sciences politiques et d’art de gouverner. Pourquoi ? Guy Philippon, posait la question lors d’un précédent café-philo : « La politique est-elle un conflit indésirable qu’il faudrait éliminer, ou l’expression d’une liberté créatrice qui doit être protégée et canalisée ?» Nous pouvons la reposer aujourd’hui.
Débat : – La politique ne se limite pas aux seuls partis politiques. L’art renvoie à la culture, à l’expérimentation, à la politique vue du point de vue organisation culturelle réfléchie ou spontanée.
– Ce qui est naturel se dénomme la loi de la jungle à contrario de la politique qui est organisée pour vivre en harmonie.
– On peut reprocher que l’on ne tienne pas assez compte du monde des vivants. La science n’est pas assez sensible au contrat social et au contrat naturel.
-La politique concerne tout le monde. Elle n’est pas réservée à un parti. Les gens doivent se prendre en charge et participer.
– D’un point de vue historique entre gouvernant et gouverné, l’art est l’outil visant à faire passer un message.
– Aujourd’hui, il faut que tout le monde participe, intervienne et donc vote.
– L’écologie concerne la terre entière. Elle ouvre des horizons. La politique doit prendre en compte les injustices et le devenir de la planète.
– Il ne faut pas tout demander et attendre de la politique qui est devenue quotidienne.
– Pourtant la politique doit être un art. Il faut maîtriser l’art de la rhétorique afin de rechercher l’approbation de masse.
– L’artiste n’est pas dans la réalité et la politique n’est pas non plus dans la réalité.
– L’art c’est l’habileté de tourner autour des propositions et c’est aussi la représentation.
– L’art c’est aussi concrétiser une émotion. L’art du musicien c’est de faire passer ses idées et de se créer un personnage.
-On parle de politique en prenant pour acquis la démocratie. C’est notre chance mais pas celle de tous dans ce monde car « j’ai travaillé dans des dictatures et j’apprécie d’autant plus ».
– Tous les citoyens qui agissent font de la politique, au sens grec du terme. Ils participent à la vie de leur quartier, de la cité ou aident leur prochain. Faire de la politique ce n’est pas uniquement avoir des responsabilités ou remplir des fonctions. Pour les élus l’art c’est de définir des projets, les faire partager et accepter que les citoyens puissent sanctionner si les promesses ne sont pas tenues. Les élus sont comptables de leurs promesses. La politique est aussi une science. Ne parle-t-on pas de sciences politiques, de sociologie politique, de sciences humaines….? Il y a donc une part de rationnel pour réussir ou tenter de réussir des projets. Toutefois, il existe aussi la politique politicienne. C’est l’art de faire du spectacle et ainsi la reconnaissance compte plus que le contenu. Ce qui est préoccupant aujourd’hui, ce sont les 45% d’abstentionnistes. 1 électeur sur 2 ne se sent plus concerné par la politique. Pour tous ces abstentionnistes peu leur importe que la politique soit un art ou une science.
– Il n’y a pas de modèle mathématique aujourd’hui, seulement des lois que l’on applique et qui sont nos règles d’existence.
– La science reproduit des schémas. C’est une notion de temps. Il n’y a pas de durée politique. G La vie politique c’est l’immédiateté au contraire de ce qui se faisait auparavant avec des projets à long terme (exemple Jules Ferry et l’école laïque).
– Il faut un investissement fort, un engagement personnel fonction de l’intérêt général.
– Les intentions qui animent les politiques sont rarement sur le long terme et sur le global. L’échéance de leur projet est concrètement leur prochaine élection.
-Les gens doivent s’investir et ainsi faire bouger les lignes pour construire à plus long terme.
– Il faut une prise de conscience individuelle afin que les gens participent à la vie de la cité.
– « Je déplore l’abstentionnisme et il faut souvent un danger pour que les citoyens réagissent et agissent ».
-La science de la stratégie conduit à des manipulations (exemples : le vote utile, les partis en ont pris plein la tête ; l’Irak et la préparation psychologique du peuple américain à la guerre …).
– Le mot science peut conduire à la manipulation, à la tricherie et le politique l’utilise pour obtenir des voix.
-L’art, c’est la manière de s’exprimer. La science intervient au moment de l’expérimentation (exemple : la décentralisation par l’expérimentation, c’est vouloir des résultats immédiats).
– Les sénateurs élus pour 9 ans, c’est l’inertie de la démocratie.
– « Doit-on baisser les bras face à la mondialisation que nous subissons ? Peut-on se défendre où est-ce fatal ? »
– Tout cela a une dimension politique en Europe. Si l’on ne fait pas l’Europe, les gens n’auront que les USA comme référence et seule alternative.
–« J’ai souvent cru aux politiques mais combien de fois ai-je été cocu ? »
– Il reste des valeurs républicaines afin de rendre les gens heureux et de donner une finalité à la politique. Il y a des modèles différents (exemple : Airbus et Boeing : pas la même chose).
– « Assistez à un conseil municipal, vous verrez que les affaires sont bien gérées mais lorsque vous montez dans les institutions, c’est plus dur » lance une participante sous forme d’invitation.
-Le politique est obligé de connaître le contexte, les réalités et de faire des choix : un équilibre concret entre la conscience humaine personnelle et les choix assumés.
En conclusion, la synthèse du corrigé du bac: La Politique a deux sens possibles.
Le domaine politique : ce sont les institutions chargées de faire exister les choses publiques « res publica » : question de l’Etat, de sa constitution, de l’organisation des pouvoirs destinés à réguler la vie sociale, à harmoniser les intérêts individuels.
La vie politique :
– Les rapports de force entre les partis et surtout l’importance de la décision.
– La politique du point de vue du gouvernement.
– L’exercice du pouvoir impliquant une relation entre gouvernant et gouvernés.
La science : plusieurs notions.
– La raison : la science est synonyme de connaissance rationnelle.
– Les lois : définition d’une recherche de la vérité. La science démontre, expérimente. Elle est de l’ordre de la théorie.
L’art :
Il implique des règles puisque c’est un savoir-faire. A la différence de la science, il est de l’ordre pratique ou pragmatique : l’art permet d’agir et de transformer, il concerne aussi bien l’action que la production. Il concerne moins la vérité que la réussite d’une entreprise. Il requiert de l’habileté et une forme de raisonnement. Il faut savoir juger pour bien faire.
Ce thème m’a beaucoup intéressé et je suis prêt à le partager avec les membres de mon Grin pour une discussion