Le soir venu
Si le matin je suis à quatre pattes,
je suis promesse, imaginée sans fin.
Si le midi, debout, rien ne me mâte,
je suis le jour, juste un subtil parfum
Le soir venu, grisaille chenue, homme.
Si c’est un rêve, ombre légère qui passe
je suis néant et firmament voilé
Croque la pomme, et le vers qui dépasse
Je suis vivant, la connaissance est née
Le soir venu, je n’irai pas à Rome
Si c’est un piège, un miroir aux alouette
je suis image, échafaudée en vain
La vie rêvée, lovée sous sa couette
qui traverse le grand miroir sans tain
Le soir venu, que reste-t-il en somme
Si c’est un rôle, je l’ai appris par cœur
en révisant, par dessus ton épaule
Des stratégies, quelques bribes de bonheur,
tous les savoirs, pas vus à l’école
Le soir venu, j’ai jeté mon chewing-gum
Si c’est une œuvre, éphémère par essence,
tout à côté de mes châteaux de sable,
je creuserai, un puits qui fera sens
Tout ce qui reste, en rasant la table
Le soir venu, enfin j’aurai pris forme.
Ecrit, et lu par Florence Desvergnes, lors du café-philo de l’Haÿ-les-Roses
le 15 janvier 2003
Thème du débat :
« Qu’est-ce qu’une vie réussie ? »
Pour le moins le poème, lui, est réussi.