Thème : « Les habitudes sont-elles nuisibles ? »
Essai de restitution du café philo
du 22 Septembre 2004. Chevilly Larue.
Modératrice : Chantal Deluchat
Animateurs : Guy Pannetier, Guy Philippon.
Introduction : (Guy Pannetier): Lorsque du « Chaos », ont surgi le jour et la nuit, le soleil sur son char se mit à tourner autour de la terre, et vinrent les jours, les saisons, notre espace spatio- temporel était créé, lequel allait régler notre bio-rythme, initier nos toutes premières habitudes
C’est l’habitude de se mettre sur ses membres inférieurs pour voir dans la savane, et la modification des ses habitudes alimentaires, qui feront les hominoïdes, « l’homo Erectus », lequel par l’observation, la répétition des gestes, par la force de l’habitude, va devenir « Homo Faber »… Comme les tous premiers hommes nous ne sommes à la naissance que dans le verbe « Être », dans l’Inné…, c’est avec le temps que nous accédons au verbe « Avoir, à l’acquis…, toute notre éducation passera par la répétition, nous apprenons par l’habitude.
Mais pour autant toutes les habitudes acquises sont-elles utiles, ou sont elles nuisibles ?
Débat: – Les habitudes sont parfois mauvaises, voire dangereuses, et nous ôtent tout principe de prudence…L’imprévu nous surprend
– Mais les habitudes nous permettent d’acquérir peu à peu l’usage, de créer certains automatismes, une « seconde nature » indispensable, même si nous devons être vigilants pour ne pas nous fier qu’aux habitudes.
– Pourtant, si en philosophie on bannit souvent les habitudes, elles sont nécessaires pour vivre en société ….tel : dans une réunion comme la nôtre, il faut l’habitude de l’écoute, de la politesse… Les habitudes ne sont pour l’enfant qu’éducation, après les apprentissages et la répétition des actes pratiques. La répétition du bon usage, est comme le tuteur pour l’arbre, qui créera les bonnes habitudes, pour faire des enfants socialement éduqués. Ainsi, l’histoire de cette famille qui avait de nombreux enfants, certains avaient de bonnes habitudes, d’autres de mauvaises, entraînant de fâcheux comportements…
– Mais, il n’y a pas d’antinomie entre apprentissage et habitude….Tout apprentissage depuis l’enfance, fera non seulement une être social, mais aussi un être politique, culturel…
– Si on ne pratique pas par habitude, on n’apprend plus, et se déshabituer peut, être, désapprendre…
– Cependant, lorsque la force de l’habitude devient la règle dans l’exercice d’un métier, on finit par « ronronner », on évolue plus …et l’habitude nous dévalorise…alors il faut dépasser l’habitude, savoir « rompre avec ses habitudes » !
– A ce sujet le psychologue Jean Piaget a parlé dans l’apprentissage de trois phases :
1° L’accommodation : une situation nouvelle, au début on tâtonne, on est maladroit et peu à peu on améliore le geste…
2° L’assimilation, le geste devient plus facile, plus courant, plus expérimenté ;
3° C’est l’intégration, on sait nager, conduire, surfer sur le Net… l’âge venant, il est plus difficile de changer ses habitudes, elles sont alors nuisibles, des ornières…, ainsi en est-il de l’utilisation du portable, de l’ordinateur..
– Il est mentionné le mot d’une jeune romancière de Fresnes : « ce qui me tue c’est pas l’habitude, c’est la routine » !
– Nous tombons inévitablement dans la routine, par nécessité. Horaires de travail,…ou environnement,…les mêmes personnes que nous voyons chaque jour…
– Par ailleurs, on peut vivre toujours dans un même milieu, voir très souvent les mêmes personnes, et tout à la fois « ne pas s’encroûter » et apprendre des autres, évoluer, changer.. !
– Il s’ensuit quelques proverbes redondants :
« L habitude est une chemise de fer dont on se défait en se blessant ».
« L’habitude est un sixième sens qui domine tous les autres ».
« Quand on a mangé une fois salé, on ne peut plus manger sans sel ».
– Pour autant doit-on rester « esclaves de nos habitudes ». Mais en faisant de nouveaux choix de vie, tel : une religion, une association, un parti politique, on modifie nos usages habituels… Mais les habitudes peuvent ne pas être toujours un choix spécifique, la force de l’habitude agit sur nous, nous subissons parfois un matraquage : publicitaire pour diriger nos habitudes de consommation, ou, matraquage médiatique Et nous intériorisons les modèles proposés afin d’adhérer et accepter l’ordre dominant ; c’est le concept de d’Habitus, avancé par le sociologue Pierre Bourdieu.Par ailleurs, pour rompre avec nos habitudes, dans notre vie au quotidien, nous changeons nos tenues vestimentaires ; c’est la mode, qui change régulièrement.. mais la mode finit par être l’habitude de s’habiller tous pareils ! Encore « une ornière ».,
– Une question est posée : Vous avez sûrement vous aussi des petites habitudes, n’y a-t-il pas là parfois un processus sécurisant ?
– Ce côté sécurisant dénote peut-être chez l’individu un côté enfantin.
– Du reste les animaux de compagnie vivent au rythme de nos habitudes, c’est pour eux sécurisant. Ce qui nous rappelle que les animaux, comme les hommes sont liés à un bio-rythme.
– N’existe-t-il pas un héritage génétique qui nous ferait reproduire, sans les avoir appris, les comportements de nos ancêtres ? Habitudes qui cette fois ressortiraient de l’inné et non de l’acquis…
– On peut observer que notre vie en société est le prolongement d’évolutions nombreuses. Elle s’inspire de l’esprit des droits de l’homme. Mais elle est en pleine mutation, changeant nombre de ses habitudes ; sans perdre son esprit critique, confrontée à de nouveaux schémas de pensée, elle s’adapte, s’habitue et accepte, y compris cette nouvelle société de l’image, du numérique, qui bouscule nos habitudes.
– D’ailleurs « L’homme le meilleur est un Être qui s’habitue à tout, hélas ! ». Mais, peut-on « Tout dire », ou « Tout faire » par habitude…
– C’est vrai que notre vie sociale est encore en bien des domaines régie par le code Napoléon… Tout au plus voyons-nous de temps à autre, un lifting, alors que nos modes de vie ont entre-temps beaucoup évolué, il y a décalage…
– L’habitude, tout le répétitif de nos actes, de nos gestes, peut, malgré tout être une aide pour surmonter un deuil ? « On oublie rien de rien, on s’habitue, c’est tout ! ». Jacques Brel.
– Nos habitudes que nous trouvons ennuyeuses peuvent être l’occasion de rompre avec les habitudes, faire quelque chose de tout à fait inhabituel, et par là une source de plaisir…
– Pour la plus grande partie des habitants de la terre, ce sont des habitudes qui règlent leur vie : l’Usage, la Coutume, la Tradition, la Religion…
Conclusion : Ce thème inhabituel a inspiré les habitués du café philo. Bien que nous soyons ancrés dans nos habitudes, le monde évolue, et nous avec, démontrant comme l’a dit Darwin, que nous sommes « une espèce évolutive ». La modernité, notre futur, ne sera qu’incessantes ruptures avec nos habitudes, même si, comme vous l’avez souligné, nous évoluons aussi grâce aux habitudes, « Il faut durer pour changer, il faut changer pour durer ». Si, une fois pour toutes, nos habitudes ne pouvaient être changées, alors à tout jamais, l’homme ne pourrait être « perfectible ! ».
Je pense que pour l’organisme, les habitudes ne sont pas nuisibles, au contraire, elles permettent à l’organisme de se réguler. Par exemple, il est bon de toujours faire ses besoins à la même heure. Mais quand il s’agit d’habitudes professionnelles par exemple, cela peut être néfaste. On a l’habitude de parler dans notre métier et on devient un moulin à paroles et cela ne se contrôle plus à la fin.