Thème: Faut-il avec Platon condamner les Sophistes ?

Essai de restitution du débat- Café-philo de Chevilly-Larue
28 février 2008

Periclès. 495 . 429.

Animateurs : Guy Pannetier. Michel Perrin. Guy Philippon.
Modérateur : Christian Lacaud.
Introduction au débat : Guy  Pannetier.


Périclès

Introduction : Nous avons tous entendu ou, le mot sophisme, sophisme ou sophistication, lesquels nous donnent une mauvaise image du sophisme. Rappelons que les synonymes les plus courants sont : hypocrite, tartuffe, faux jeton! Dans les définitions  étymologiques des  philosophes à cette époque  on voit diverses approches, la première  parle de  « sophrôsuné »  (sagesse mesure/modération) et une autre de  « sophia » (sagesse savoir), les Sophistes vont surtout enseigner la sagesse savoir.
Le mot sophiste a prit une connotation péjorative au cours de l’histoire de la philosophie, de par l’influence des ouvrages, entre autres, de Platon et d’Aristote qui les ont vivement critiqués. Les Sophistes ont souvent été « les penseurs maudits », condamnés comme faux philosophes, comme imposteurs. Les Pères de l’Église (de la philosophie scholastique) qui pendant tout le Moyen-Âge furent les maîtres de la pensée occidentale, vont perpétuer la mauvaise réputation, et l’anathème. Ils sont les premiers éducateurs du peuple, dérangeant en cela qu’ils ne respectent pas les règles académiques. On peut dire d’une certaine façon qu’ils sont les précurseurs des professeurs de philo, puisqu’ils se faisaient payer pour leurs services. Ils s’intéressaient à l’astronomie, la géométrie, la physique, les mathématiques, la grammaire, les techniques, les arts, donc ils ne furent pas uniquement professeurs de rhétorique, des dialecticiens, ils représentaient un courant de philosophie, mais leurs écrits vont disparaître. Ils étaient souvent comparés aux sceptiques, par des approches relativistes, celles où « tout se vaut, et rien ne vaut », et ils savaient avec la même verve soutenir deux théories contradictoires. Nous allons essayer de les resituer, mais  2500 ans après il nous manque bien des éléments : le mode de vie, les conventions sociales, mœurs, coutumes, l’habitat…..
Les Sophistes vont en quelque sorte être le résultat d’une mutation  historique et sociale. Le peuple accède à la citoyenneté, mais il faut l’outil de la parole pour participer efficacement aux débats, il faut des hommes qui enseignent cette technique.
Contexte historique : On ne peut appréhender l’histoire de la pensée sophistes sans voir l’aspect historique, remettre suivant l’expression, « en perspective ». Toutes ces réformes qui se font autour des années 500 av. JC vont retirer le pouvoir exclusif aux familles riches dominantes, et retirer peu à peu les privilèges des aristocrates. Elles sont l’œuvre de quatre réformateurs, qui seront : Solon, législateur, dit « Père de la démocratie », Dracon autre réformateur qui nous laissera l’expression des « lois draconiennes », Pisistrate, tyran, qui le premier renverse le pouvoir aristocratique, ce qui va montrer pour le moins que la domination des riches familles athéniennes, les « Aristos » (les meilleurs) n’est pas immuable, puis de nouveau le réformateur Clisthène devra renverser les Aristocrates et leurs retirer certains privilèges quelques années plus tard.
Un début de démocratie s’installe à Athènes sous l’autorité alors de Périclès. On parlera alors du « siècle de Périclès », en fait trente de paix qui vont permettre l’essor des arts, de techniques, et une évolution de la société, de cette toute nouvelle démocratie. C’est vers ces années que le citoyen commencera à avoir un statut, mais nous ne sommes pas encore dans la démocratie que nous connaissons. Les gens du peuple (Demos) commencent à avoir accès aux fonctions électives, à parler et voter lors des assemblées, mais il leur reste un sérieux problème qui est celui de l’art de la parole, du débat contradictoire, ils sont confrontés aux Aristocrates qui eux connaissent toutes les ficelles de la rhétorique, certains prennent des cours à l’école de Platon, l’Académie. Il faut qu’on leur apprenne cet art du langage, et ils vont payer pour cela…Ceux qu’on appelle les Sophistes ont peut-être vu là « un bon filon » et l’ont exploité. Les sophistes sont le résultat d’une mutation historique et sociale. Un des premiers sophistes est Protagoras, on raconte à son sujet cette anecdote: le philosophe  Démocrite eut l’occasion de côtoyer dans un port un portefaix, un porteur, homme à tout faire. Ce porteur lui paraît très malin, éveillé, et comme cela se fait à cette époque il l’achète, il s’agit en fait de Protagoras, il en fera son secrétaire (cette anecdote nous laisse à penser que Protagoras était alors un esclave)
Le Sophiste Protagoras vers 444 écrit des lois pour Périclès, qui vont dans le sens de la démocratisation. Il faut rappeler que Platon est un aristocrate et il se peut qu’il ait quelques ressentiments quand à cette situation, quand à l’accès pour leur peuple au débat politique. Pour cela les Sophistes  seraient alors pour lui,  des « ennemis de classe », il y a alors antagonisme politique. Nous connaissons tous le rôle primordial de la sémantique dans la domination des peuples, qui détient la parole détient le pouvoir.
Alors ! A votre avis, faut-il avec Platon, condamner les Sophistes ?

Débat :    – Les Sophistes furent un courant de pensée, ils sont surtout connus par les critiques à leur encontre. Ils ont été tournés en dérision par Socrate, et aussi par Aristophane dans son théâtre. Une des caractéristiques du discours des Sophistes est l’absence de métaphysique.., rappelons qu’à l’époque tout ce n’avait pas d’explication avait un dieu : Arès pour la guerre, Éros pour l’amour…., et avec des luttes entre ces dieux. Cela les Sophistes vont le dépasser, en s’appuyant davantage sur les valeurs humaines : « de toutes les choses, la mesure est l’homme : de celles qui sont, du fait qu’elles sont; de celles qui ne sont pas du fait qu’elles ne sont pas.» (Protagoras). Ainsi, c’est par l’homme et du point de vue de l’homme, que le bien et le mal, le vrai et le faux prennent leur définition. La justice absolue ne peut donc exister car elle est relative. Mais derrière l’absence de métaphysique s’annonce le fondement  physique, ils évoquent les liens entre les hommes et la Terre, l’univers.., ils s’intéressent à l’astrologie, la numérologie.., il en reste les signes du zodiaque.
–  Avec l’aides Sophistes c’est posé le principe de la souveraineté populaire, l’acceptation par tous des décisions prises…Pourquoi les Sophistes vont-ils en ce temps avoir du succès ? Quelles connaissances vont-ils diffuser, et dans quel but ? Ils sont les « conseillers en communication » de l’époque, les hommes politiques les recherchent et les paient cher.., Ils considèrent que la connaissance est source de profit. Le propos des Sophistes sous entend une vision du monde qui repose sur un relativisme total. Ils ne croient pas qu’il existe une réalité spirituelle donnant un sens au monde, à l’homme, ainsi qu’à la vérité, la morale et la beauté. Tout n’étant que conventions humaines, pour eux « le vrai est ce qui paraît à chacun », tout repose sur l’homme qui ne repose sur rien, il n’y a pas de place pour la connaissance objective, mais pour les opinions, les expressions et sensations, mais  ils mettent l’homme au centre de toute réflexion philosophique…Les Sophistes ne sont pas humanistes par amour de l’homme, mais par cynisme. Profondément pessimistes quant à la réalité humaine, ils pensent qu’on ne peut diriger la société qu’en manipulant les foules : « l’homme est un animal mû par ses pulsions dans une réalité aveugle, on ne peut le pousser à agir qu’en flattant des désirs » d’où l’efficacité, si l’on a pas le temps d’expliquer à chacun, autant en tromper un grand nombre.
– On peut se poser des questions. Ne sont-ils que le produit d’une époque, ou aurions-nous actuellement des Sophistes, des gens qui sont payés pour manipuler l’opinion? Je ne dirai pas que Platon a condamné les Sophistes, mais qu’il en a condamné les excès. Une des plus grandes révolutions intellectuelles introduites par les Sophistes est le débat  « l’Inné et l’acquis ». Avant la Révolution on considérait qu’on naissait avec les qualités innées de vertu. Avec les  Sophistes la  vertu, les qualités premières peuvent  s’acquérir… Quand Aristophane moque les Sophistes, il compare parfois Socrate aux mêmes sophistes, c’est-à-dire qu’il corrompt la jeunesse, comme eux, qu’il n’honore pas les Dieux, comme eux. Ce que va surtout condamner Platon c’est qu’ils ne recherchent pas le vrai, mais la seule finalité de pouvoir par la parole.
– Extrait de texte : « …Brillant et frais comme une fleur, tu passeras ton temps dans les gymnases au lieu de débiter sur l’Agora des bavardages épineux sans queue ni tête comme on fait aujourd’hui, ou te démener à propos d’une petite affaire toute de chicane, contestations et roueries.., on te rendra prêt à croire que l’honteux c’est l’honnête, est que l’honnête est honteux» (Aristophane. Les nuées. 1000/1023)
– On a évoqué les rapports de Socrate avec les Sophistes, enfin ce que nous en a dit Platon, particulièrement dans le « Protagoras » (Dialogue) où Socrate débat avec un sophiste. Dans le fait que doit-on penser quand on sait que Socrate prenait des leçons auprès du célèbre sophiste Pridicos, des leçons qu’il payait deux oboles…
– Protagoras dut subir un procès pour impureté, car il professait l’agnosticisme. « Au sujet des Dieux, je n’ai aucun savoir, ni qu’ils sont ni qu’ils ne sont pas, ni quel est leur manifestation. Nombreux en effet sont les empêchements de le savoir, leur caractère secret, et le fait que la vie de l’homme est comptée ». Pour cela il fut condamné à quitter Athènes et ses ouvrages furent brûlés en place publique. Des écrits nous indiquent que ce fut particulièrement Platon qui demanda à ce que les ouvrages de Protagoras fussent brûlés.  Des auteurs avancent que Platon a pu alors plagier Protagoras, particulièrement dans le Théétète. Ce qui peut poser problème : une des plus grandes référence de la philosophie serait à l’origine d’un autodafé !
– Oui ils sont condamnables, car les  Sophistes disent que mieux vaut commettre une injustice que de la subir, donnant par là, raison, à la raison du plus fort. Les premiers sophistes vont faire circuler cette idée que vérité et moralité sont essentiellement affaire d’opinion. Souvent dans les ouvrages de Libéralisme économique, nous rencontrons ce personnage qu’est Friedrich Von Hayek, lequel utilise une argumentation prêtée aux Sophistes : « La morale est un ensemble de valeurs partagées entre les individus, elles constituent des normes admises, et comme toutes les normes admises, elles peut être reconsidérée ». (La route de la servitude 1947).
– Non, ils ne sont pas condamnables, nous doit Michel Onfray dans une chronique nommée : « réparation faite aux Sophistes ». Il rappelle déjà les glissements sémantiques qui ne sont pas seulement propres aux sophistes. Le  mot sophiste continue de véhiculer une connotation péjorative, de tromperie, de sophistication, de manipulation  du langage, de propos spécieux seulement destinés à tromper l’interlocuteur. C’est  nous dit-il la vindicte de Platon à l’égard des Sophistes qui a perduré dans le temps. Platon réfutait l’idée première de Protagoras qui faisait de « l’homme la mesure de toute chose », les Sophistes disaient alors qu’il fallait d’abord appréhender le monde comme il est, placer la réalité avant l’idée. (Tout comme l’élève de Platon, Aristote). Ils étaient pour cette époque un peu des nomades de la philosophie, ils n’enseignaient pas dans une école, dans des lieux réservés, mais directement près du peuple, ils sont craints car ils sont d’habiles rétheurs, ils ne défendent pas comme Platon les lois, ils ne vantent pas l’idée du roi philosophe. Leur enseignement s’en trouvait moins élitiste, ils enseignaient aux fils du peuple la rhétorique qui pouvait leur permettre d’accéder aux fonctions représentatives, ils enseignaient au plus grand nombre, avec eux on va philosopher dans la rue, il sont alors considérés comme subversifs, ils représente déjà l’idée d’éducation populaire, ce qu’on appelle aujourd’hui Université populaire,  ce qui déjà mettait   en danger les pouvoirs culturels et politiques en place, ceux qui sont les soutiens des dominants d’une époque.   Et, ce que leur reprochait surtout Platon qui était un aristocrate, c’est qu’ils se faisaient payer, et qu’ils travaillaient plus sur la forme que sur le fond. De plus, leur philosophie se faisait hors d’Athènes, autre sujet de désagrément pour Platon pour qui tous les habitants des autres cités étaient pratiquement des étrangers, (le parisianisme d’aujourd’hui). Aujourd’hui ceux qui font profession de philosophie, profs enseignants, écrivains.., philosophe de plateau de télévision sont payés et nous n’y voyons rien d’anormal. (Fin du texte de Michel Onfray).
– Il leur sera surtout de se faire payer au même titre que les potiers, les sculpteurs, ceux qui enseignaient la technique, ramenant la philosophie au rang de la « techné » c’était corrompre l’enseignement de la sagesse.., Quant à l’enseignement au peuple, cela se limitait au peuple qui pouvait payer, ce qui va les faire considérer par Socrate, comme amoraux.
– Ils ont élevé l’art de la dialectique à son plus haut sommet, en démontrant une chose et puis son contraire, c’est du grand art. C’est finalement très moderne.., nous pouvoir un homme politique changer de camp sans changer de discours, et inversement…
Poème de Florence : « La putain, le poivrot et  philosophe. Qui est qui? »

Assis au seuil de son tonneau, de tout son long
Diogène s’étirait en ce tardif matin.
J’ai faim se dit-il, et pas même un bout de pain,
Ni une olive. C’est toujours la même chanson.

Mes élèves m’attendent et je n’ai plus un rond,
Pour quatre mines je leur montrerai le chemin,
Prenons une lanterne sans attendre demain,
Il fait sombre dans la caverne de Platon.

C’était le plein midi dans les rues d’Athènes
Son falot à la main cheminait Diogène

Un peu plus loin, sur Aristippe, il tomba
Qui titubait, par un sophisme, assommé,
– « He ! Diogène, où vas tu de cet air décidé ? »
– « Je cherche un homme, et toi d’où viens tu de ce pas ? »

– « J’étais au banquet, avec des amis là-bas,
Les désirs insatiables des hommes j’ai observé
Socrate était là, et avec lui j’ai trinqué…
Si peu ; la vertu est dans les actes, n’est-il pas ? »

– « Ami, tu n’as rien compris ! » s’exclama Diogène
« A ce théâtre, dont le monde est la scène ! »

Sur ses cothurnes ailés marchait la déesse.
– « C’est décidé, cynique hédoniste je serai ! »
S’écrièrent nos deux héros d’un seul trait.
– « Que donnerais-je pour effleurer tes tresses ! »

– « Pour quelques drachmes tu peux même toucher mes fesses,
L’union de l’essence et de la forme, tu ferais.
Disciple d’Aristote je suis et resterai.
Va t’en, ta philosophie ne vaut pas une pièce ! »

Ainsi s’en fut la péripatéticienne,
Et, dans les rues d’Athènes, cheminait Diogène

– Lorsque j’étais en terminal mon plaisir était dans les dissertations d’arriver à démontrer très précisément le contraire de ce que nous avait enseigné le professeur de philo.., on peut se retrouver dans les sophistes, avoir une certaine admiration , en dehors de leur aspect amoral.
– Il  n’y pas pire malhonnêteté que la malhonnêteté intellectuelle, pour cela ils sont condamnables… bien que les meilleurs Sophistes aient apporté d’appréciables contributions aux préceptes éthiques, elles  ne servent le plus souvent qu’à poursuivre les intérêts particuliers.
–  Toutes les bases de la sémantique partent des études des sophistes. On leur attribuera parfois le syllogisme, qui a été formalisé par Aristote. Le syllogisme a deux propositions, appelées également prémisses. C’est Aristote qui le premier va formaliser le syllogisme. Par exemple (Syllogisme dit de Barbara) : « Tous les hommes sont mortels – Or les Grecs sont des hommes – donc les Grecs sont mortels. Les deux propositions (dites : prémisse majeure et mineure) sont des propositions données et supposées vraies permettant de vérifier la véracité formelle de la conclusion.
– Construction du Syllogisme : 1ère Proposition. Prémisse majeure : Toutes les choses rares sont chères.
2ème Proposition.  Prémisse mineure : Un cheval bon marché est rare.
Conclusion :                                   Un cheval bon marché est cher.
Ils développent une argumentation trompeuse, tel,
L’argument dit circulaire : « Les serpents venimeux sont utiles, sans eux on ne pourrait pas fabriquer le sérum contre leur venin ». On retrouve un exemple d’argument circulaire dans le Candide de Voltaire : « Si Christophe Colomb n’avait pas attrapé cette maladie, la vérole, et même infesté toute l’Europe, nous n’aurions jamais connu le chocolat ».
L’argument quantitatif, utilisé en publicité pour les marques par exemple, «  Tout le monde fait comme cela » ou,   par des journalistes qui nous vendent l’opinion (leur opinion): « L’opinion généralement admise veut que… »
L’argument « Ad populum». « Dieu doit exister puisque la majorité des hommes y croient depuis des millénaires »
L’argument de la foi : «  C’est vrai puisque c’est écrit dans le livre sacré »
Le paradoxe : nous avons vu le paradoxe du menteur qui émet une proposition qui contient un raisonnement et son contraire : « Je suis Crétois » dit Epiménide  et «  Tous les Crétois sont des menteurs ». Alors dit-il la vérité ou ment-il ? Nous connaissons aussi le paradoxe de l’œuf et de la poule. En semant ainsi le doute permanent dans des esprits faibles, ils désorientent et rendent le « cerveau disponible », ouvert à toute possibilité.
La prolepse, qui consiste à répondre soi-même aux objection qu’on pourrait faire aux propos, aux idées qu’on a développé, tâchant ainsi de désamorcer toute critique.
– Le sujet est d’autant plus difficile à appréhender que bien qu’ils aient une certaine renommée, on  a aucun écrit, si ce n’est quelques sentences pour résumer un courant de pensée, le reste n’étant que des commentaires, faits le plus souvent par des personnes qui ne aimaient pas du tout. (Tous les écrits ont été brûlés). Nous ne retrouvons pas d’écrits, même de la deuxième ou la troisième sophistique. Ils ont été écartés des enseignements chez les Grecs, puis au Moyen-Âge. Ils redeviennent à la mode aujourd’hui dans la mesure où les hommes politiques utilisent les savoirs, les notoriétés intellectuelles. Mais nous retenons surtout que les Sophistes ont fait un apport certain à l’enseignement pour tous.
– La pensée après les Grecs sera captée par les religions du Livre. Comment iraient-elles enseigner commenter des agnostiques ? Ils ont été rayés, des études pendant très longtemps, décriés comme le furent les Epicuriens transformés en viveurs impénitents, alors qu’ils prêchaient la tempérance.
– La sémantique, le domaine d’excellence des sophistes : De tout quand un groupe veut  s’emparer du pouvoir, il utilise les forces ou les moyens dont il dispose. Depuis un siècle nous avons vu l’utilisation de la sémantique, changeant le vocabulaire, le contrôlant, modifiant les concepts, le sens, introduisant dans le langage des néologismes, mettant du flou dans le sens des mots, afin de tromper la masse. Nous l’avons particulièrement observé avec le totalitarisme soviétique, où les communistes de la ligne dure se reconnaissaient de par le monde par leur vocabulaire Stalinien. Nous sommes nombreux à mettre en garde contre toute phraséologie spécifique. Ouvrez bien vos oreilles, écoutez les propos de certains récitants du catéchisme dogmatique vous entendrez ci et là les  mêmes mots, mêmes expressions qui dénotent d’un langage commun à un groupe de personnes, de conseils en communication, qui étudient avec attention vos réactions, qui s’entourent d’analystes qui décodent, qui conseillent, qui orientent judicieusement  le discours. On prend les taureaux par les cornes, l’homme par la parole. (Proverbe). Ce vocabulaire reprend souvent les mêmes Néologismes, ce sera : Archaïsmes pour parler des acquis sociaux – Les syndicats sont devenus des partenaires sociaux – L’acte de gouverner devient « La gouvernance » – L’usager devient client. – Les cliniques se nomment désormais hôpital – Le service public était récemment présenté sous le service d’intérêt général et économique. Et de belles expressions comme le  fameux « Contrat gagnant/gagnant ». On pourrait en citer encore des dizaines qui prouvent une volonté de déplacer le sens, d’orienter, et voire même de manipuler la pensée. La Novlangue amène inévitablement son Big Brother, nous pouvons avoir parfois, l’impression d’être devant de nouveaux sophistes. Certains diront même que nous que nous sommes le troupeau qu’on mène à la parole.
– Formule de sophiste : Quand tu ne veux rien changer, change le verbe !
– Est-ce que les avocats ne seraient pas la meilleure image actuelle des sophistes ? Comme eux ils ne recherchent pas la vérité, ce n’est pas leur rôle. Il est à signaler que bien des hommes politiques sont aussi des avocats, ça n’arrange rien !
– Nous avons évoqué l’antagonisme politique, idéologique et religieux des Sophistes avec Platon Nous avons presque fait un procès à Platon, faut-il envisager une contre enquête ?
– Les Sophistes nous ne pouvons plus écarter l’objectif du subjectif, et qu’une vérité vaut en un temps, en un lieu, dans un contexte…
– Cette dernière intervention est sophiste, avec la notion de relativisme absolu, « l’homme le mesure de toute chose » …

Conclusion : Nous ne pouvions nous intéresser à la philo sans porter un regard sur les Sophistes.. Nous avons vu les exemples exemple de l’ambiguïté du langage que sauront bien exploiter les Sophistes,  et aurions pu citer  les Jésuites qui mériteraient aussi un débat.. Au final, les Sophistes nous mettent en garde contre les dangers de la rhétorique, de « l’entourloupe langagière », ils nous rappellent que la philo ne doit  pas être qu’une joute verbale, ils nous rappellent à la modestie, en  nous démontrant que savoir, n’est pas forcement sagesse. On leur doit pour le moins que « la philosophie occidentale ne soit pas « qu’une suite de commentaires de Platon ». On mentionne rarement le nom du Sophiste Lycophron qui déjà en ce temps évoquait la notion de contrat social que reprendront Thomas Hobbes et J. J. Rousseau. Pour avoir formé le peuple à assumer sa toute nouvelle souveraineté populaire, ils peuvent être considérés comme des révolutionnaires, avec pour seule arme, la parole. Tout comme les maîtres d’armes donnaient des leçons de maniement aux nobles, à ceux qui « portaient l’épée », les Sophistes donnèrent des leçons de maniement pour donner à chacun la possibilité de se défendre, avec la parole. Sans les sophistes, la pensée rationnelle et le comportement humain seraient-ils les mêmes ?
Que nous apporte d’étudier ces philosophes, leur époque ? Tout d’abord, ils nous informent que la connaissance n’est plus uniquement réservée à une élite héréditaire et que l’on peut apprendre beaucoup plus de choses qu’on ne le pense. Ils introduisent aussi la notion de technique en éducation, c’est-à-dire que l’on peut enseigner à penser, à bien parler, à discuter et à convaincre. Et ils nous obligent à prendre conscience que le langage ne doit pas être une arme exclusivement au service au service de ceux qui la rétribue.
« Autrefois les sophistes parlaient à un petit nombre d’hommes, aujourd’hui la presse périodique leur permet d’égarer toute une Nation ».                    Balzac (Le curé de campagne).

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5 réponses à Thème: Faut-il avec Platon condamner les Sophistes ?

  1. GBA TIEMOKO SAMUEL dit :

    très bon texte .moi je cherche du soutien ; mon projet de memoire est sur le sophisme. j’ai besoin des documents

    • cafes-philo dit :

      Très bon sujet
      Vous pouvez essayer de trouver l’ouvrage de Catherine de Romilly de l’Académie française
       » Les Grands Sophistes dans l’Athènes de Périclès.
      En consultant en ligne les ouvrages de la libraire Vrin à Paris
      Vous trouverez des ouvrages sur ce thème
      peut-être trouverez-vous aussi des documents en ligne sur Bibliothèque Nationale de France – Gallica-
      Ils font partie comme les Epicuriens de ceux qui sont à réhabilter
      depuis des siècles la pensée religieuses les a présentés comme infréquentables
      Bon courage, bon travail

  2. d’après moi le sophisme ne condamne pas car on a besoin de l’état l’homme très sophisme en tant qu’il est capable de dire ce qu’il dit. Sophisme important, car ils peuvent convaincre les gens de nombreux côtés. en particulier le bon moment pour découvrir cette atmosphère règne entre eux. et la prise de conscience chez ses voisins. Ils estiment également que l’existence de sophisme est discours prononcé à convaincre les gens. Merci de mes amis!!!!

  3. Odilon Yao dit :

    Chaque fois que lis un article qui parle de la sophistique, je suis heureux de savoir que je ne chémine pas seul. En fait, je prépare une Thèse sur ces penseurs modèles et je serai ravis d’avoir de votre part des indices bibliographiques voires une codirection dans votre université.

    • cafes-philo dit :

      J’ai aimé l’oeuvre de Jacqueline de Romilly
      Les grands sophistes dans l’Athènes de Périclès
      réhabilitons toujours les sophistes
      Il nous enseignent les subtilités du langage
      non pour tromper mais pour ne pas être trompés…

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