Restitution du débat – Café-philo de l’Haÿ-les-Roses
9 février 2011
Courten van Angelo. 1886
Avant d’aborder le débat, nous avons évoqué le décès de la poétesse Andrée Chédid, qui a vécu dans cette ville de L’Haÿ-les-Roses. Son œuvre avait été la référence du dernier printemps des poètes en 2010. Nous lui avions rendu hommage en lisant nombre de ses poèmes.
Introduction par Guy Pannetier: Pour paraphraser la célèbre phrase de Martin Luther-King, « I had a dream ! » (J’ai fais un rêve!), j’ai rêvé d’un univers « Bisounours », où nous étions dans un monde où l’on pouvait avoir une confiance totale dans tous les autres. Mais, comme vous tous, j’ai vécu des expériences. Je sais que l’homme est parfois « un loup pour l’homme », ce qui n’exclut pas la femme, et que ces loups savent abuser les pauvres moutons, les agneaux naïfs, les crédules au bord du ruisseau de la fable. Nous ne sommes pas dans un concept abstrait. Nous avons tous vécu des situations où la confiance fut un point essentiel. Après toutes ces années, nos expériences, nous pouvons dire, soutenir, que la confiance est le fruit de l’expérience.
Je ne suis plus l’enfant qui est totalement confiant ; d’ailleurs, ce dernier n’a pas le choix. Je suis bien au-delà de l’adolescent qui découvrait souvent le fossé entre la parole et l’action. Puis, j’ai entendu les expressions : « Chat échaudé craint l’eau froide », « J’ai payé pour apprendre », « Il a endormi ma confiance », etc., ainsi que la moralité de la fable de La Fontaine « Le renard et le corbeau » : « Mon bon Monsieur, / Apprenez que tout flatteur / Vit aux dépens de celui qui l’écoute. » Malgré tout cela, je suis naturellement enclin à faire confiance, mais pas avec « la foi du charbonnier », car la méfiance a été aussi un principe pour survivre en entier, alors, avec l’expérience.
Je n’ai pas confiance dans les gens qui regardent leurs chaussures quand ils vous parlent.
Je n’ai pas trop confiance dans les gens qui ont la poignée de main qui n’est pas franche.
Je n’ai pas trop confiance dans les gens qui ont une confiance excessive en eux, ce qu’on nomme aussi l’aplomb !
Je n’ai pas trop confiance dans les gens qui utilisent un langage flou, ambigu, sibyllin ou des périphrases creuses, car je sais qu’« on prend les bêtes par les cornes et les hommes par la parole » (proverbe auvergnat).
Je n’ai pas trop confiance dans les gens qui me disent trop souvent : « Faites-moi confiance ! »
Je n’ai pas une absolue confiance en moi, car je suis faillible, donc, il se peut fort que vous soyez faillibles.
La confiance, cette certitude qui peut être temporaire ou éphémère, est une tête de Janus, une monnaie à deux faces, confiance et méfiance. « Confiance et défiance sont également la ruine de l’homme », disait Hésiode. Ne pas faire confiance aux autres, ne juger tous les hommes qu’à partir des défauts de quelques-uns, mène directement à la misanthropie : c’est Alceste. Celui qui est enclin à la confiance dans les autres, dans la vie, dans son devenir, c’est l’optimiste. Nous nous rappelons le héros du conte de Voltaire, Candide, qui pensait être dans « le meilleur des mondes possibles » ; lequel Candide, après toutes ses péripéties, avait grandement perdu la confiance; il avait choisi son domaine de confiance, son jardin. La confiance reste, on l’évoquera sûrement, une forme de foi. Si, pour certains, elle n’est pas liée au divin, elle reste foi en soi, comme foi dans les autres ; elle reste essentiellement un don à l’autre, un principe de notre humanité.
Le plus grand moment de confiance que nous puissions connaître, c’est lorsque nous sommes très amoureux ; nous sommes prêts à une confiance totale, confiance dans l’avenir, confiance dans l’autre, confiance aveugle, aveuglée : «Car l’on croit toujours / Aux doux mots d’amour, / Quand ils sont dits avec les yeux / […] / Un serment n’est qu’un leurre / J’étais folle de croire au bonheur / […] » (extraits de Mon amant de Saint Jean, chanson de 1942 du parolier Léon Agel et du compositeur Emile Carrera). Pour redescendre sur terre, il y a un contre-point, comme disait Jovette Bernier : « La confiance, d’accord, mais c’est quand même ce qui fait les cocus ! ».
Débat : G C’est parfois la défiance qui fait les cocus. A force de soupçon, ça peut provoquer la situation.
G Ce serait quand même un monde invivable, si on n’avait pas confiance en un minimum de personnes. On ne pourrait pas avoir d’amis. Dans la famille, on se méfierait les uns des autres. Cela doit être horrible quelqu’un qui n’a aucune confiance ; cette personne est seule.
G La confiance peut être mesurée, pas toujours donnée à cent pour cent. Mais si l’on ne faisait pas un petit peu confiance, ce monde ne pourrait pas avancer. C’est la confiance avec de l’espoir qui fait marcher ce monde. Mais en politique parfois on fait confiance, puis, après, il y a des déceptions.
G Pour répondre à une question, l’expression « avoir une foi de charbonnier », nous vient de Fleury de Bellinger (XVIIème siècle) à partir d’un conte :
Le diable un jour demanda à un malheureux charbonnier : – Que crois-tu ?
Le pauvre hère répondit :
– Toujours je crois ce que l’Eglise croit.
Le diable insista :
– Mais à quoi l’église croit-elle ?
L’homme répondit :
– Elle croit ce que je crois !
Le diable eu beau insister, il n’en tira guère plus et se retira confus devant l’entêtement du charbonnier. Dans la chanson « Le mécréant », Georges Brassens dit : « J’voudrais avoir la foi, la foi d’mon charbonnier, / Qui est heureux comme un pape et con comme un panier. » Mais là, c’est méchant pour ce pauvre charbonnier, bien obligé d’avoir confiance en quelque chose pour supporter sa dure condition.
G Les hommes politiques nous font des promesses qu’on dit « électorales ». Divers hommes politiques ont dit : « Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent » [reprise d’une citation d’Henri Queuille, Président du Conseil sous la 4ème République]. Ces propos très négatifs tuent la confiance dans le politique et nous amènent à une défiance et une abstention très forte.
G Je voyais la question sous l’angle : « Est-il sage ? ». La sagesse et la prudence ont toujours été une approche philosophique, une façon d’appréhender l’existence. Donc, nous sommes devant la confiance dans l’existence, ce qui est justement un moyen d’atteindre une forme de sagesse.
G Avoir confiance dans un auteur, c’est sentir, découvrir des atomes crochus et souhaiter le connaître encore plus. Avoir confiance n’est pas neutre, c’est choisir le plus important. C’est toujours, pour un auteur, celui qui nous parle au plus et au plus loin.
G Si la confiance est le fruit de l’expérience, alors, oui, c’est de la sagesse. Ensuite, il y a notre nature, même avec nos paradoxes. Je fais, ou je ne fais pas confiance, et cela souvent sans même me poser la question.
G Je fais confiance à beaucoup de gens, mes amis, ma famille, mon médecin, mes voisins. Je vis dans un îlot de confiance et c’est très bien. Par contre, avoir trop confiance dans l’avenir, c’est négatif. Parce que si tu t’attends au pire, tu te dis que le pire peut arriver, risque d’arriver, et tu te prépare à l’affronter. Si tu penses que c’est le meilleur qui va arriver, tu vas être cassé quand le pire arrivera. Je pense à quelqu’un qui attend le résultat d’un examen médical, il faut s’arrimer à la réalité pour affronter la vie.
G J’ai entendu la question dans tous ces sens, confiance dans la vie, dans les autres, mais aussi confiance dans soi-même, dans ce qui nous entoure ou dans tout ce qui peut nous arriver. Lorsqu’on est dans une action, c’est rare qu’on y aille tête baissée; on a analysé les possibilités, les enjeux et il entre ensuite la part de confiance. Seul le résultat nous dira si nous avions raison d’avoir confiance. La confiance est donc une part optimiste qui donne une dynamique à l’action, mais avec toujours un minimum de connaissance de cause, sinon c’est de la naïveté ou de l’utopie. Quand on entend l’expression, « la confiance règne », ce n’est pas si sûr que cela !
G Dans son œuvre « La filiation de l’homme », Darwin nous explique en quelque sorte que la confiance fut comme une loi transcendantale incontournable pour la création de notre structure sociale. Nous avons dû faire confiance par nécessité, laquelle est devenu instinct, ce que Darwin nomme « instinct social ». C’est parce que dans cette nature nous étions les plus faibles, que nous n’avions pas le choix, qu’il a fallu agir ensemble en confiance, pour survivre. Et là, la vie fait alors confiance non pas aux plus forts, comme on le dit trop souvent, mais aux plus aptes à la confiance, pour créer un groupe homogène. La vie n’a qu’un but, prolonger la vie, et elle choisit, elle fait confiance dans l’adaptabilité sociale. Ce qui pourrait nous montrer qu’une société où l’on a de moins en moins confiance, où l’on se défie de tout, où on s’assure contre tout, où on fait des contrats pour tout, une société où l’on sent monter chaque fois un peu plus les individualismes, une société qui perd confiance en sa capacité à construire ensemble, sera peut-être en train de faire le chemin à l’envers, aller vers sa fin. Autrement dit, la confiance est une loi suprême non écrite, c’est tout le ciment de la société : vivre, c’est faire confiance.
G Pour moi, la confiance, c’est une forme de crédit symbolique, qui à un moment ou un autre sera remboursé. On ne peut pas faire confiance à quelqu’un et ne pas espérer avoir aussi en retour une confiance. C’est cette forme de crédit qui rend la vie possible, la vie économique et sociale qui la structure dans le libre échange des ressources. Il ne faut peut-être pas confondre confiance et assurance. La confiance, c’est ce dont nous avons besoin, alors que nous ne pouvons pas avoir l’assurance de quelque chose. Alors pouvons-nous avoir une confiance aveugle et tout accepter sans poser de question ?
G On a évoqué la confiance dans l’avenir. On peut ne pas avoir forcément confiance dans l’avenir, ni être en défiance. L’avenir nous réserve de bonnes choses et cette pensée nous aide à avancer, à nous battre. Même dans des situations de maladie grave, il faut cette confiance pour vaincre le mal.
G Si on n’espérait pas du bon dans l’avenir, autant se suicider tout de suite !
G Plus que la sagesse, c’est la prudence qui doit présider à la confiance.
G On a essayé les voies : « est-il sage », « est-il raisonnable », et, si nous évoquons la prudence, on revient vers la « prudencia » des Romains et la « phronèsis » des Grecs, nous revenons aux sources des philosophies. L’extrême prudence de ces derniers excluait pratiquement l’idée de confiance et toute spontanéité.
Par ailleurs, on a évoqué des situations, où il faut se défier de trop de confiance pour ne pas « tomber de haut ». C’est aussi sagesse de ne pas trop s’illusionner sur le lendemain, mais, fort heureusement, « le pire n’est jamais sûr ! »
G Un des axes importants, c’est déjà la confiance en soi. Mais, je ne pense pas qu’il y ait des gens qui ont une totale confiance en eux-mêmes. Ceux qui montrent une confiance excessive, sont souvent des personnes qui manquent de confiance, c’est une façade. Acquérir de la confiance en soi, c’est quelque chose qui se travaille, qui se structure, quand on arrive à avoir une légitimité. Se faire confiance est peut-être ce qu’il y a de plus difficile au monde. La fausse confiance en soi se ressent, et génère alors de la méfiance.
Ensuite, au niveau sociétal, c’est vrai que la société actuelle marche sur la confiance au niveau économique. Nous avons tous (plus ou moins) des billets dans les poches, ce qu’on appelle, monnaie fiduciaire, du latin « fiducia » (confiance), mot dont la racine est « fides » (foi). Nous savons tous que ce n’est que du papier. La monnaie qui fut basée sur une valeur or, n’est plus maintenant qu’un crédit sur l’économie, c’est le ciment de cette société. Si la confiance tombe, c’est le monde financier et toute l’économie qui s’écroulent.
G La confiance en moi que j’ai pu acquérir, je la dois déjà à ceux qui m’ont fait confiance, dans mon travail, par exemple.
G Pour moi, la confiance n’est ni naïveté, ni utopie. La confiance, parfois, c’est aussi du courage, le courage d’affronter l’avenir.
Le poème de Florence : Est-il sage d’avoir confiance ?
Dans le grand livre du destin
J’ai suivi les péripéties
Que les Dieux dessinent à la main
C’est écrit, qu’il en soit ainsi
La première paramécie
Portait déjà tous les vocables
La vie, la chaîne qui nous lie
Aux voies du ciel impénétrables
Et si la vie est un festin
J’ai goûté chaque facétie
Je fais confiance en son chemin
Et les doutes et les avanies
Des aiguillages de la vie
Nous conduisent imperturbables
Toujours plus loin et sans merci
Aux voies du ciel impénétrables
Et faire confiance en son destin
Est la meilleure philosophie
J’ai trébuché sur le chemin
J’ai pleuré, qu’il en soit ainsi
J’ai annulé tous les sursis
En équilibre un peu instable
Pour aller un peu endurcie
Aux voies du ciel impénétrables
Se battre est une acrobatie
Et j’ai donné mon âme au diable
Pour laisser toutes arguties
Aux voies du ciel impénétrables
Le sage a toujours confiance
Et consulter la Pythie est inscrit dans le plan
Dans tout mal il y a un bien qui sommeille
Le tout est qu’il se réveille
Vous n’auriez pas un peu de café ?
G « Je crois que je vais gagner au loto, oui, j’ai confiance ! » Celui qui croit cela risque fort d’être déçu ! Il y a des cas où c’est bien d’être optimiste, mais ça nous échappe, il y a la part du hasard. Quand on a confiance dans une idée élevée, un idéal, c’est une forme de foi. Par exemple, celle de tous ceux qui se sont engagés dans la Résistance. Nombreux furent tués, mais ils avaient confiance dans la victoire, la libération ; pour eux, c’était un moteur.
G Le modèle de confiance est celui qui sait affronter les difficultés, avec la volonté de croire que ses efforts, quoiqu’il arrive, ne seront jamais vains ; ce sont des personnes comme cela qui forcent le destin, qui exploitent tous leurs possibles, ceux-là qui en fait nous redonneraient confiance. Même devant l’absurdité de la vie, Sisyphe remonte son rocher. Camus nous dit qu’il faut voir Sisyphe comme un homme heureux, symbole de la confiance malgré tout dans la vie, la foi du charbonnier, en quelque sorte.
Sommes-nous confiants par nature, par tempérament, autrement dit, par une propension innée ? Ou est-ce le fait du caractère ? Donc de l’enfance, de l’environnement, de l’éducation, du modèle parental. Des parents craintifs font-ils des enfants craintifs ou des enfants confiants ?
Le symbole de la confiance, ce pourrait-être ce regard d’un chien à la S.P.A. qui regarde passer celui qui pourrait être son maître. Toute la confiance du monde est parfois dans ce regard d’animal. S’il est adopté, il est prêt à donner tout son amour en toute confiance. Parfois, ce qu’il ne sait pas, c’est qu’aux prochaines vacances, il peut se retrouver attaché à un arbre. Alors, comme on met des puces électroniques aux chiens maintenant, pourquoi n’en mettrions-nous pas aux maîtres qui adoptent ? Ainsi on pourra sans peine les localiser par GPS, s’ils trahissent la confiance de cet animal, puisqu’on ne peut pas totalement faire confiance dans leur humanité.
G Dans le fonctionnement de la société, on nous demande de faire aveuglément confiance ; on nous bourre tellement le crâne que la confiance finit par être à géométrie variable. Les citoyens font assez facilement confiance, ils votent, ils délèguent, puis ils se désintéressent. Par exemple, il est difficile de trouver des gens pour les bureaux de vote, les conseils municipaux, les tribunaux.
G Confiance et défiance sont tout autant dans notre part animal, que dans notre part de raison.
« …en contemplant le nid, nous sommes à l’origine d’une confiance du monde, nous recevons une amorce de confiance, un appel à la confiance cosmique. L’oiseau construirait-il son nid s’il n’avait son instinct de confiance au monde. » (Bachelard. La Poétique de l’espace)
G Se comporter comme les Stoïciens, ne pas prendre de risque, éteindre tous les désirs, cela ne fait pas prendre de risque et ne nécessite pas la confiance. Mais ce n’est pas vivre, car vivre est un élan où il faut de la confiance dans les autres, avec les risques que cela comporte, voire même « tomber dans le panneau » ; vivre, c’est un risque!
G Que la confiance soit quelque chose de réciproque, je n’y crois pas trop. J’ai trop été bernée. Peut-être parce que je n’ai pas su déceler les comédiens. Qu’est-ce que je me suis fait avoir ! Je continue néanmoins à faire confiance en sachant que je peux encore me faire avoir.
G A priori, ma réponse serait, non, il n’est pas sage d’avoir confiance, surtout confiance aveugle. Ce qui nous renvoie à Darwin qui va commencer à comprendre en observant un tremblement de terre que rien n’était stable, que tout est en évolution permanente, donc pas de confiance dans un projet, un but ; cela a été une découverte. Donc, avec lui l’écroulement de la confiance a permis un progrès et des découvertes. Dans cette démarche, il n’y a ni confiance, ni défiance.
G Le grand exemple de confiance, c’est la foi religieuse, qui inclut la foi dans l’avenir. Mais cette confiance peut être dangereuse. Par exemple, les kamikazes qui vont au bout de leur foi et qui se font sauter en tuant des dizaines de personnes, c’est bien qu’ils ont confiance dans ce qu’on leur a dit et répété : qu’ils iraient directement au paradis, où il leur serait offert 70 vierges. Mais qu’a-t-on promis aux femmes kamikazes : 70 éphèbes ?
G Ça n’a rien à voir avec la confiance. Ce sont des intégristes, ce n’est pas de la religion et ça n’a plus rien à voir avec l’Islam.
G On a vu des kamikazes au Japon, il ne s’agissait pas de confiance dans une religion.
G Ceux qui inspirent la plus grande confiance, ce sont les escrocs !
G On a parlé de confiance ou de perte de confiance par rapport à un diagnostic. Lorsqu’une mauvaise annonce est faite, il y a un sentiment de trahison du corps, de l’organisme. Toute la confiance s’en va d’un seul coup ; il y a un sentiment de révolte ; la relation avec soi n’existe plus. Il y a une déconstruction totale de l’être.
G La confiance est un trajet, une démarche que personne ne peut faire pour nous ; on ne peut se l’épargner ; c’est quelque chose qui nous alerte en permanence. On a besoin d’adhérer à un ensemble d’idées. Dans notre existence, nous choisissons ceux à qui nous ferons confiance.
G Il est sage d’avoir confiance dans l’instabilité des choses. Cela pose le débat de l’éternité, de choses enfantines revendiquées par les religions et de la réalité éphémère des choses représentées par les sciences. La confiance serait la stabilité, serait croire dans des choses inamovibles, et la sagesse serait dans l’avenir en mouvement, dans l’incertain.
G Un alpiniste dévisse et se trouve suspendu à un bout de rocher. Il crie : « Au secours ! Y a quelqu’un ? Y a quelqu’un ? » Une voix lui dit : « Je suis Dieu. Lâche le rocher, je te recevrai dans mes bras.» L’alpiniste hésite un instant, puis de nouveau il appelle : « Y a pas quelqu’un d’autre ? »
G La confiance peut être cette fleur qui pousse sur le terrain du désespoir, quand des hommes perdent toute confiance en un avenir, ils s’accrochent à n’importe quelle petite lueur qui créerait ce brin de confiance en demain.
Extrait d’une chanson du rappeur Abd Al Malik : Gibraltar : […]
« Sur le détroit de Gibraltar, y’a un jeune noir qui n’est plus esclave, qui crie comme les braves, même la mort n’est plus entrave. /
Il appelle au courage celles et ceux qui n’ont plus confiance, il dit « ramons tous à la même cadence ! ! ! ». /
Dans le bar, y’a un pianiste et le piano est sur les genoux, le jeune noir tape des mains, hurle comme un fou. /
Fallait qu’elle sorte cette haine sourde qui le tenait en laisse, qui le démontait pièce par pièce. /
Sur le détroit de Gibraltar, y’a un jeune noir qui enfin voit la lune le pointer du doigt et le soleil le prendre dans ses bras. /
Maintenant il pleure de joie, souffle et se rassoit.
Désormais l’Amour seul, sur lui a des droits. /
Sur le détroit de Gibraltar, un jeune noir prend ses valises, sort du piano bar et change ses quelques devises, /
Encore gros d’émotion, il regarde derrière lui et embarque sur le bateau. /
Il n’est pas réellement tard, le soleil est encore haut ». / […]
Sur le détroit de Gibraltar s’échouent les « pateras »* [* nom donné aux embarcations de fortune.] qui n’apportent au mieux que des mourants, qui étaient partis confiants dans ce modèle européen qu’on leur montre, qui les aveuglent. [En contrepied, dans Gibraltar, le jeune noir vogue vers le Maroc].
G En conclusion, pour répondre à la question : « Qu’est-ce que la confiance ? », je dirai que c’est la rectitude, la croyance dans la rectitude et dans les valeurs morales des autres, la « capacité à » et peut-être une foi, une foi en l’autre indicible, subjective, un besoin irrépressible de croire en l’autre pour croire en soi. Vivre, c’est faire confiance.
Bravo ppour les bons poèmes de Florence